Le fait que nous abordions le sujet des emballages de café avec Colruyt Group n'a rien de fortuit. Primo, cette marchandise se vend particulièrement bien dans tous les magasins de la chaîne. Et secundo, le groupe est propriétaire de l'un des plus gros ateliers de torréfaction de Belgique. Celui-ci date de 1937 et il a été lancé par Franz Colruyt à Hal. L'activité a été transférée sur le site de Ghislenghien en 2007 dans une nouvelle unité de 3 800 m2. Quelque 7 600 tonnes de grains de café y sont torréfiées chaque année pour produire 149 références différentes. 75 sous la marque Graindor, 12 en Everyday, 23 en Boni Selection Bio et 39 pour Spar. Le tout est vendu dans trois grandes catégories de conditionnements: boîte alu, paquet (café moulu sous vide emballé sous plastique) et sachet plastique avec valve. Les cafés sont aussi proposés sous formes de dosettes, capsules et cafés-filtres, qui peuvent en principe aussi être considérés comme des types d'emballage spécifiques.
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Le fait que nous abordions le sujet des emballages de café avec Colruyt Group n'a rien de fortuit. Primo, cette marchandise se vend particulièrement bien dans tous les magasins de la chaîne. Et secundo, le groupe est propriétaire de l'un des plus gros ateliers de torréfaction de Belgique. Celui-ci date de 1937 et il a été lancé par Franz Colruyt à Hal. L'activité a été transférée sur le site de Ghislenghien en 2007 dans une nouvelle unité de 3 800 m2. Quelque 7 600 tonnes de grains de café y sont torréfiées chaque année pour produire 149 références différentes. 75 sous la marque Graindor, 12 en Everyday, 23 en Boni Selection Bio et 39 pour Spar. Le tout est vendu dans trois grandes catégories de conditionnements: boîte alu, paquet (café moulu sous vide emballé sous plastique) et sachet plastique avec valve. Les cafés sont aussi proposés sous formes de dosettes, capsules et cafés-filtres, qui peuvent en principe aussi être considérés comme des types d'emballage spécifiques. Nous avons eu l'occasion de parler café et emballages avec Jonathan Martens, expert en packaging chez Colruyt, et Kris Durant, maître-torréfacteur. Avez-vous une équipe spécifique chargée du développement des emballages de cafés de la marque? JONATHAN MARTENS: "Le café n'est pas traité différemment des autres produits sous marque propre. Les emballages des marques de distributeur fabriquées en interne sont de la compétence de quatre personnes, qui sont responsables de tous les achats relatifs aux processus de production. Nous faisons bien partie des plus grands torréfacteurs de Belgique, mais la part du café dans notre volume de marques de distributeur est plutôt limitée. Colruyt est surtout fort dans les charcuteries et les salades. Nous avons aussi nos marques propres en pain, fromage, produits végés et vins. Les quatre acheteurs se font naturellement assister par les chefs de fabrication, les responsables qualité, le département marketing et l'équipe de développement durable, dont je fais partie. Je suis la personne qui se consacre à 100% à la durabilisation des emballages au sein du groupe Colruyt." N'est-il pas étrange que l'un des plus gros torréfacteurs de Belgique ne compte pas de packaging manager en ses rangs? KRIS DURANT, maître-torréfacteur: "L'explication est logique: la manière d'emballer le café est restée la même depuis des décennies, et cela vaut pour tous les acteurs du marché. Le volume est tellement important que les initiatives de R&D viennent des fabricants d'emballages eux-mêmes. Ils ont ainsi accumulé au fil des ans une expertise que nous ne pourrons jamais internaliser. D'où les partenariats étroits que nous avons noués avec les fournisseurs d'emballages. Nous leur portons volontiers main forte pour tester les nouveaux concepts et matériaux. Surtout lorsqu'il s'agit d'innovations susceptibles de nous permettre de réduire notre empreinte écologique." Les emballages de café actuels constitueraient-ils un problème pour l'environnement? KRIS DURANT: "Comme le café torréfié continue de dégazer après coup, son conditionnement est un processus complexe. Ce gaz doit être évacué, ce qui se fait traditionnellement par l'intermédiaire d'une soupape intégrée à l'emballage. Le café doit par ailleurs être protégé au maximum d'une exposition à l'air, à l'humidité et à la lumière. L'oxygène et l'humidité accélèrent le vieillissement, ce qui donne rapidement au café un goût désagréable de vieux papier. La lumière déclenche quant à elle un processus d'acidification qui a lui aussi un effet négatif sur les propriétés organoleptiques. Un autre problème encore se pose avec les grains de café: leur torréfaction fait apparaître de minuscules fissures qui laissent s'échapper des huiles minérales. Ce processus accéléré par la lumière provoque l'apparition d'une couche graisseuse qui colle à l'emballage. Pour garder ces phénomènes sous contrôle, nous devons recourir à des matériaux d'emballage composites. Des emballages totalement transparents sont également exclus. Surtout quand on sait que Colruyt Group entend garantir une haute qualité constante sur une durée de conservation de douze mois." Des alternatives durables sont-elles en préparation? JONATHAN MARTENS: "Avec l'équipe de développement durable, nous abordons la problématique dans sa globalité: santé, société, bien-être animal et environnement. Tous ces domaines sont depuis longtemps sous les feux de l'actualité, mais la quête d'emballages durables s'est surtout accélérée ces deux dernières années. Des matériaux d'emballage nouveaux et alternatifs font l'objet d'expérimentations sous différents angles. Raison pour laquelle Colruyt Group a osé prendre un engagement ambitieux. Tous les emballages de nos marques propres devront être soit recyclables, soit réutilisables, soit biodégradables d'ici 2025. Du fait de leurs propriétés barrières complexes, les emballages de café sont probablement ceux qui posent le plus grand défi, mais nous croyons fermement en une issue positive." À quelles solutions pensez-vous concrètement? JONATHAN MARTENS: "La piste de réflexion qui a le plus de chance de succès est l'application de matériaux de composition moins complexes, mais présentant de bonnes propriétés barrières malgré tout. Nous étudions actuellement un emballage 'full PE', plus facile à recycler que la combinaison traditionnelle de PET et PE. Une partie de notre café est commercialisé en boîtes métalliques. Pourquoi dès lors ne pas passer intégralement à ce conditionnement, direz-vous. Cette solution pourrait de prime abord sembler plus intéressante que des emballages en PET/PE car l'aluminium est entièrement recyclable. Si ce n'est que sa refonte demande malheureusement beaucoup d'énergie, d'où une empreinte écologique considérable. De plus, les boîtes doivent être livrées préformées, ce qui implique un trafic de camions plus important. Tout bien considéré, on se rend compte que la boîte métallique n'est pas particulièrement plus écoresponsable que les emballages traditionnels. Une autre solution qui tiendrait la corde à première vue est un emballage en carton comparable aux tetrapacks que tout le monde connaît. Des études ont toutefois démontré que les propriétés barrières requises ne peuvent être obtenues que moyennant l'ajout de différents films, ce qui nuit naturellement au potentiel de recyclage. Sans compter les difficultés supplémentaires qui surgissent en cours de production, que ce soit au remplissage, au soudage, etc. Voilà pourquoi nous nous dirigeons actuellement vers une application maximale de matériaux recyclés et d'emballages moins complexes." Quels sont les plus grands défis à relever dans votre quête de durabilisation des emballages de café? KRIS DURANT: "Comme nous garantissons une durée de conservation et une haute qualité constante de douze mois, toute alternative prend plus d'un an à tester. Chaque fois qu'une innovation prometteuse apparaît sur le marché, nous emballons notre café dans ce nouveau matériau. Après quoi nous le goûtons à intervalles réguliers. Ainsi ne savons-nous vraiment qu'au bout de douze mois si les propriétés barrières offertes sont suffisantes. Et peut-être qu'entre-temps, d'autres innovations plus intéressantes auront vu le jour... Un deuxième obstacle est la machinabilité des nouveaux matériaux dans notre parc. Autrement dit, sont-ils compatibles avec nos lignes de conditionnement? La vitesse de production n'est-elle pas menacée? La qualité des soudures est-elle suffisante? L'intégration d'une soupape est-elle encore possible? Autant de questions auxquelles nous devons trouver réponse avant de procéder aux essais de fabrication. Enfin, nous devons toujours tendre vers un équilibre entre développement durable et rentabilité économique. Nous restons en effet une organisation commerciale. En d'autres termes: c'est souvent l'efficacité économique qui prime." La tendance à la 'commodité' a eu un énorme impact sur l'offre de café. Capsules et dosettes ont rapidement fait fureur. Hélas, la quantité de déchets d'emballages a augmenté de manière proportionnelle. Le groupe Colruyt planche-t-il sur des alternatives plus durables dans ce domaine également? JONATHAN MARTENS: "Nous suivons évidemment les tendances dans le domaine des dosettes et des capsules avec beaucoup d'attention. Ce type de conditionnement est hélas encore plus difficile à remplacer par des alternatives durables. Les dosettes fonctionnent sur le même principe que les filtres à café. Le café moulu est contenu dans du papier renforcé de fibres de plastique. Ce matériau assure une perméabilité optimale et évite que la dosette ne se déchire en cours d'utilisation. Pas mal de recherches sont actuellement en cours sur des dosettes convenant pour un compostage domestique. Hélas, les résultats ne suivent pas car il n'existe pas de bonne alternative aux fibres plastiques. Le problème est plus aigu encore avec les capsules, car cet emballage joue un double rôle. La capsule en PE est en effet fermée par une double épaisseur de plastique: une pour la conservation du café et l'autre pour une diffusion optimale de l'eau chaude dans celui-ci. Nous menons des essais avec différents types de capsules: en aluminium, biodégradables et compostables à domicile. Les résultats pour l'aluminium sont prometteurs, sauf que nous retombons sur le même problème: l'empreinte écologique du recyclage. Et puis comment faire pour collecter toutes ces capsules? La recherche sur les matériaux compostables est également positive. Sauf qu'il n'existe encore aucun cadre légal pour cette solution. Sans oublier que chaque marque de machine à café demande des capsules spécifiques. Quand bien même nous parviendrions à mettre au point une capsule durable, il nous faudrait limiter notre offre aux modèles les plus courants. Ou développer notre propre appareil, ce qui est aussi possible, naturellement." L'avenir des emballages de café sera-t-il sans plastiques? JONATHAN MARTENS: "Je dirais plutôt le contraire. Le plastique a peut-être mauvaise presse pour le moment, mais il reste un matériau particulièrement intéressant pour emballer les denrées - et en particulier le café. Les multiples alternatives apparues ces derniers temps sur le marché présentent rarement les mêmes propriétés barrières que leurs équivalents plastiques. La règle numéro un dans le secteur agro-alimentaire reste certainement d'actualité: un gaspillage du produit est maintes fois plus néfaste pour l'environnement que son emballage plastique. Aussi est-il nécessaire que nous nous y prenions mieux et autrement avec les plastiques. Application plus large des monomatériaux, processus et techniques de recyclage plus complexes, emballages réutilisables, matières premières durables... là est l'avenir."