Ann Delmotte (56 ans) a succédé à Maxence Wittebolle à la direction générale de l'IBE-BVI au 1er avril. C'est lors d'une visite à l'institut qu'elle a appris fortuitement, de la bouche même de son prédécesseur, que le poste serait bientôt à pourvoir. "Je me trouvais à l'Institut belge de l'emballage pour raisons professionnelles, afin de m'informer sur les possibilités de tests", confirme Delmotte. "À l'époque, j'étais chez A. Schulman Plastics depuis huit ans. Cette société met au point des concentrés de couleurs et des additifs, qui sont produits pour, et vendus à, l'industrie de la plasturgie, essentiellement pour des emballages alimentaires. Au fil de la discussion, Maxence m'a confié que l'âge de la retraite approchait et qu'il cherchait tout doucement un remplaçant."
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"Je suis allergique au plastic bashing"
Avec Ann Delmotte, l'Institut belge de l'emballage (IBE-BVI) s'est doté d'une nouvelle directrice générale qui a largement gagné ses galons dans l'industrie du packaging. Après un certain nombre d'années consacrées à la recherche, cette docteure en chimie avait troqué le monde académique contre la réalité industrielle. Ayant en outre rempli diverses fonctions de management auprès de multinationales des industries de l'automobile et des plastiques, elle fait désormais bénéficier l'IBE-BVI d'une somme considérable d'expertise et d'expérience.

Ann Delmotte (56 ans) a succédé à Maxence Wittebolle à la direction générale de l'IBE-BVI au 1er avril. C'est lors d'une visite à l'institut qu'elle a appris fortuitement, de la bouche même de son prédécesseur, que le poste serait bientôt à pourvoir. "Je me trouvais à l'Institut belge de l'emballage pour raisons professionnelles, afin de m'informer sur les possibilités de tests", confirme Delmotte. "À l'époque, j'étais chez A. Schulman Plastics depuis huit ans. Cette société met au point des concentrés de couleurs et des additifs, qui sont produits pour, et vendus à, l'industrie de la plasturgie, essentiellement pour des emballages alimentaires. Au fil de la discussion, Maxence m'a confié que l'âge de la retraite approchait et qu'il cherchait tout doucement un remplaçant." Sur le moment, Delmotte a simplement pris acte de l'information de Wittebolle, mais la graine était semée. "A. Schulman Plastics avait été rachetée en 2018 par le géant des polymères LyondellBasell, ce qui avait entraîné pas mal de changements pour ma fonction. J'en ai a personnellement conçu beaucoup de frustration. J'avais une belle place sur papier, mais le contenu ne me convenait plus. Après ma visite à l'IBE-BVI, j'ai commencé à cogiter. Et si le moment était venu pour moi d'opérer un tournant? J'ai alors pris mon courage à deux mains et me suis enquise de la procédure. L'exercice ne fut pas de tout repos. Après une entrevue avec le recruteur est venue une conversation ouverte avec l'équipe d'évaluation de l'IBE-BVI, puis il m'a été demandé en troisième épreuve de présenter un plan quinquennal en 20 minutes. Au bout du compte, le choix s'est malgré tout porté sur ma personne à l'unanimité." Le premier pilier du "plan quinquennal pour l'IBE-BVI" de Delmotte consiste à doter d'une base encore mieux structurée, une petite entreprise (PME) dont l'effectif est entre-temps passé à vingt collaborateurs. "En attribuant des rôles et des responsabilités bien définis aux gens dans l'organigramme et en les formant et les accompagnant de manière à ce qu'ils puissent faire leur travail de manière optimale. On pourra y revenir, mais les gens doivent être autonomisés et avoir la liberté de prendre leurs propres initiatives. Et le tout doit être géré comme une organisation dynamique pouvant compter sur des spécialistes de différents domaines." Delmotte se félicite par ailleurs de continuer momentanément à pouvoir faire appel à Wittebolle, qui reste un puits d'expérience et de connaissance au bout de 37 années passées à l'IBE-BVI. "Heureusement, le passage de témoin n'est pas brutal, ce qui est essentiel quand je vois toute l'étendue de son expertise. Nous avons rebaptisé sa fonction en celle de senior consultant, ce qui correspond effectivement à ce qu'il va faire: nous aider avec son expertise et son expérience. Je n'ai toutefois rien à apprendre de lui sur la manière de manager un groupe. J'ai confiance en mes capacités car dans mon travail précédent, j'ai eu à gérer près de deux cents personnes, y compris les équipes de nuit, ce qui a nécessité de travailler avec les syndicats et, par exemple, de négocier les conventions collectives de travail. Mais Maxence a une connaissance bien plus approfondie du sujet, lui qui est resté ici 37 ans. À moi de transférer le maximum de ce savoir à nos experts et à moi-même. Le développement futur des personnes va donc jouer un rôle très important ici. Sur les 23 ans que j'ai passés au service de multinationales, j'ai pu suivre de très nombreuses formations, de la business training à la ceinture noire Lean Six Sigma. J'ai ainsi à ma disposition tout un arsenal d'outils, de connaissances et d'expérience utiles pour la mise en place et la conduite des organisations. L'avantage d'une structure de vingt personnes est que chacune d'entre elles a une influence sur la réussite de la mission. Mais pour nourrir des ambitions de croissance, il faut lui donner une assise solide." Delmotte ne tarit pas d'éloges pour "l'héritage" laissé par Wittebolle. "Ainsi, l'IBE-BVI est un interlocuteur dans les réunions de l'ONU à Genève (réglementation sur le transport des marchandises dangereuses), où il vient en appui de la délégation belge officielle en tant qu'expert ès emballages. Un tel statut ne se conquiert pas du jour au lendemain. Il est une marque de confiance et de crédibilité. Un organisme fiable qui soutient un certain nombre de choses en toute neutralité, sur la base de mesures et de techniques, loin des slogans." Delmotte prend comme exemple la thèse selon laquelle tout le monde devrait passer à des emballages biodégradables "Cela n'a de sens que si ceux-ci peuvent être isolés et triés dans un flux de déchets approprié. S'ils se retrouvent dans le sac des ordures ménagères, ils finiront bêtement à l'incinérateur. Et ce sera peine perdue. Il convient d'abord de mettre en place toute l'infrastructure de notre politique de déchets, et seulement ensuite, on pourra aller dans ce sens. Delmotte évoque la récente initiative, bonne à ses yeux, de Fost Plus: Design for Recycling. "Identifiez d'abord les flux de déchets et voyez à quoi un emballage doit ressembler pour pouvoir être recyclé de manière optimale. Cette méthode est beaucoup plus efficace si l'on veut espérer le succès du recyclage à court terme." Un autre pilier important du plan quinquennal de Delmotte est la poursuite de l'internationalisation de l'Institut belge de l'emballage, qui a déjà une filiale aux Pays-Bas avec T&CPI (Testing & Consultancy Packaging International). "L'entité a reçu l'homologation de l'agence officielle néerlandaise ILT. Nous voyons bien ce modèle néerlandais dans d'autres pays pour ce qui est du marquage ONU et de la certification. À côté des marchandises dangereuses, qui constituent l'une de nos activités principales, nous oeuvrons aussi au sein de l'IBE-BVI dans tout un éventail d'autres domaines, comme les simulations de transport et la sécurité enfants des emballages. Notre extension avec un troisième hall, qui est prévue début 2021, répondra essentiellement à la demande croissante de simulations de transport." En matière de marchandises dangereuses, Delmotte pense, par exemple, au transport des batteries au lithium, un business qui prend de l'ampleur depuis peu. Mais aussi à l'augmentation de la part de matériaux recyclés dans les emballages de produits chimiques. Celle-ci a en effet une incidence sur la viabilité de ce genre de conditionnement. "Surtout quand il ne s'agit pas d'un recyclage interne, mais d'un recyclat plastique issu de déchets de post-consommation. Et puis, il faut encore savoir ce que valent les propriétés mécaniques d'un tel matériau." Le grand avantage d'une petite organisation, dit Delmotte, est qu'elle permet de travailler de manière beaucoup plus substantielle. Dans ses fonctions antérieures, son job était souvent réduit à du pur management. "Ces entreprises sont trop grandes pour qu'un manager puisse encore s'occuper de contenu. Ici, c'est beaucoup plus équilibré. Je suis passionnée de chimie depuis mes quinze ans. Le plastique en tant que matériau est l'un des plus grands défis, car c'est une matière qui bouge - le plastique est relativement jeune, ndlr." Delmotte a d'ailleurs une opinion bien tranchée sur le sujet. "Je suis assez allergique au plastic bashing dans l'opinion publique: il y a tellement de nuances dans les plastiques. Je pense qu'une partie de notre mission consiste à rester neutre en faisant preuve d'honnêteté intellectuelle et en évitant d'aborder le sujet sous l'angle du slogan. Nous devons être attentifs à ces aspects. Nous sommes en effet aussi un centre d'information et de formation. Nous disposons, par exemple, d'équipements permettant de mesurer les propriétés barrières des films plastiques. Un aliment frais conditionné dans un complexe multicouches peut se conserver beaucoup plus longtemps, ce qui prévient une détérioration rapide et un gaspillage de nourriture. Mais ces emballages sont difficiles voire impossibles à recycler. L'équivalent monomatériau est recyclable, mais ne peut garantir qu'une durée de conservation plus courte. Quel matériau d'emballage choisir dès lors? C'est ce débat-là que nous devons mener, plutôt que d'appeler à la fin de tout plastique ou de clamer que tout doit être recyclable." Le recyclage chimique pose énormément de difficultés, estime Delmotte. "Il implique des processus énergétiques très lourds. Voulons-nous absolument tout recycler au prix de techniques d'ingénierie extrêmement compliquées? Je pense que la consommation d'énergie nécessaire pour les processus de recyclage doit être prise en compte dans l'équation." Delmotte est plus intéressée par la manière dont on pourrait rendre le recyclage plus sûr d'un point de vue alimentaire. "Plus on va recycler un matériau, plus on devra envisager des applications moins critiques Parce qu'à la longue, on n'a plus que du 'brol' à transformer. Mais en quoi, alors? Le recyclage en circuit fermé constitue un avantage pour en revenir à des applications sûres d'un point de vue alimentaire. Il est extrêmement traçable: le recyclage à l'intérieur d'un petit circuit connu à un très haut niveau. Une des applications déjà validées par l'EFSA, l'Autorité européenne de sécurité des aliments, est le recyclage du PET en bouteilles à boissons PET. Mais d'autres dossiers ont aussi été approuvés. Comme nous possédons l'équipement de test, il est très intéressant pour nous d'étudier combien de fois un emballage peut être recyclé et dans quelle mesure l'alimentarité est maintenue." Bref, il reste du plain sur la planche... et pour la nouvelle numéro un de l'IBE-BVI, ce n'est manifestement pas l'envie qui manque.
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