Le parc des machines de Daddy Kate, à Leeuw-Saint-Pierre, tourne de nouveau à plein régime. L'imprimerie produit surtout pour des détaillants, des agences de publicité, des centres culturels, etc. "Toute crise apporte son lot d'opportunités", dit Thijs Claes (37 ans), CEO du groupe graphique. L'entreprise familiale n'est pas restée les bras croisés pendant la pandémie. L'un dans l'autre, Claes se dit satisfait de l'année 2020. "Avril a été notre plus mauvais mois, avec une baisse de 50% en glissement annuel par rapport à 2019. Mais nous avons su limiter la casse sur l'ensemble de l'année, en contenant la baisse de chiffre d'affaires à -5%. Pas mal au vu des circonstances. Sans l'apport supplémentaire de nos acquisitions françaises, nous aurions essuyé un recul de 12%." Ces rachats d'entreprises sont venus à point nommé. Le chômage temporaire a permis de conserver les coûts sous contrôle et de clôturer 2020 sur un bénéfice, dont 20% seront équitablement répartis entre le personnel sous forme de bonus salarial. Le chiffre d'affaires consolidé pour 2020 a atteint 23 millions d'euros. Le groupe emploie 125 personnes.
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Le parc des machines de Daddy Kate, à Leeuw-Saint-Pierre, tourne de nouveau à plein régime. L'imprimerie produit surtout pour des détaillants, des agences de publicité, des centres culturels, etc. "Toute crise apporte son lot d'opportunités", dit Thijs Claes (37 ans), CEO du groupe graphique. L'entreprise familiale n'est pas restée les bras croisés pendant la pandémie. L'un dans l'autre, Claes se dit satisfait de l'année 2020. "Avril a été notre plus mauvais mois, avec une baisse de 50% en glissement annuel par rapport à 2019. Mais nous avons su limiter la casse sur l'ensemble de l'année, en contenant la baisse de chiffre d'affaires à -5%. Pas mal au vu des circonstances. Sans l'apport supplémentaire de nos acquisitions françaises, nous aurions essuyé un recul de 12%." Ces rachats d'entreprises sont venus à point nommé. Le chômage temporaire a permis de conserver les coûts sous contrôle et de clôturer 2020 sur un bénéfice, dont 20% seront équitablement répartis entre le personnel sous forme de bonus salarial. Le chiffre d'affaires consolidé pour 2020 a atteint 23 millions d'euros. Le groupe emploie 125 personnes. Daddy Kate est active dans le Nord de la France depuis l'acquisition de Becquart Impressions, à Tourcoing, en juillet 2019. Deux sociétés françaises ont encore été rachetées en 2020: l'Imprimerie Dumoulin, à Libercourt, et Carte Blanche, à Neuville-en-Ferrain. "Ces trois opérations se sont révélées fructueuses. Les trois entités ont été fusionnées à l'automne pour former Daddy Kate France, à Libercourt", explique Thijs Claes, qui s'attend à ce que la branche française dégage un chiffre d'affaires récurrent de 7 ou 8 millions d'euros. L'équipe de Libercourt compte 25 salariés. Leeuw-Saint-Pierre s'occupe de tout ce qui est offset, tandis que l'impression numérique et la finition sont localisées dans le Nord de la France. Un transport relie les deux sites deux fois par jour. "Centraliser la finition à Libercourt est intéressant parce que nous n'avons pas la place ici à Leeuw-Saint-Pierre. Imprimer en offset n'est pas le problème: les machines actuelles sont très rapides et peuvent absorber un grand nombre de commandes différentes. Mais tout ce que vous imprimez doit aussi être façonné et embelli. Ce qui nécessite d'autres machines et davantage de personnel pour soutenir le rythme de production des presses. Nous ne pouvons plus nous étendre ici, et le personnel qualifié est aussi plus difficile à trouver. En France, nous avons à la fois la place et la main-d'oeuvre, et le surcoût du transport est minime. Tout cela nous a confortés dans notre décision de créer un site en France pour nous implanter dans la région. Nos machines d'impression numérique sur place nous permettent aussi d'être très réactifs", poursuit Claes. La situation chez nos voisins du Sud est comparable à ce que connaissent les petites imprimeries en Belgique, analyse Thijs Claes. "Avec beaucoup d'entreprises qui avaient leur raison d'être voici dix ou quinze ans, mais qui n'ont plus eu les moyens d'investir depuis la crise de 2008. Résultat: elles se retrouvent avec un parc de machines obsolète et doivent trouver une solution. Avec notre équipement moderne, nous faisons d'office une différence sur ce marché. Notre offre est beaucoup plus large et nos prix plus compétitifs, ce qui ouvre fatalement des possibilités." Daddy Kate France représente déjà près d'un tiers du chiffre d'affaires consolidé du groupe. "Les tirages sont aussi plus longs, ce qui rend l'option vraiment intéressante. Nos clients français sont très enthousiastes à propos de ces acquisitions. Ils bénéficient à la fois d'une offre plus large et d'un meilleur service à des prix plus serrés qu'auparavant", explique Claes. Thijs Claes reste à l'affût de potentielles acquisitions en Belgique également. "Pour se développer dans un marché en contraction, il faut miser sur les acquisitions", martèle-t-il. Daddy Kate en a aligné huit sur les dix dernières années. Claes dit tenir compte d'une contraction "naturelle" de trois à cinq pour cent l'an sur le marché de l'imprimé commercial. "Nous devons de toute façon agir pour compenser cette perte. Le but n'est pas de grandir pour grandir. Aujourd'hui, nous employons cent personnes en Belgique. Nous ne voulons pas arriver à deux cents ; ce n'est pas notre ambition. Daddy Kate a encore mis la main au mois d'avril 2021 sur l'imprimerie DV3 à Overijse. DV3 appartenait à Erik De Coster, Tanja De Page et Joris Vancoetsem. Elle avait été fondée en 1967 par Felix De Coster, le père d'Erik, qui avait repris l'affaire en 1992. Joris Vancoetsem était arrivé en 2001. "DV3 est spécialisée dans les imprimés haut de gamme ; quinze personnes y travaillent. Le site d'Overijse sera fermé fin septembre et la plupart de ceux qui le souhaitent ont la possibilité d'aller travailler à Leeuw-Saint-Pierre. Nous espérons, à travers ce rachat, pouvoir réaliser un supplément de chiffre d'affaires de 2 millions d'euros sur base annuelle", dit Thijs Claes. Le rythme d'investissement de Daddy Kate reste soutenu. L'entreprise injecte cette année pas loin de quatre millions d'euros dans de nouvelles machines. Une presse numérique HP Indigo 7eco a encore été installée à la fin de l'an dernier. Au printemps, on a fait de la place pour une nouvelle presse offset huit couleurs Heidelberg (XL106-8) et une imprimante à plat hybride Agfa Tauro. L'Agfa Anapurna a été transférée à Libercourt. "Nous avons investi pour environ sept millions d'euros depuis l'été 2018", calcule Thijs Claes. Les machines sont toujours plus efficaces. "La huit-couleurs est 20% plus productive que la presse qu'elle remplace et elle avait dix ans. Ce qui veut dire abattre plus de besogne avec le même personnel. Le chiffre d'affaires augmente mais pas les coûts. Idem pour la Tauro, qui est quatre fois plus rapide que l'Anapurna", poursuit Claes. Les investissements créent un effet de levier. "En investissant dans l'efficience, on améliore sa position concurrentielle ; le coût du personnel par unité de production diminue. Cela joue aussi dans les deux sens. Les commandes de certains imprimés ne peuvent rentrer que si vous disposez de la machine spécifique, même si tout cela n'est pas sans risque". Misant résolument sur la diversification, Daddy Kate est active dans l'offset (60% du chiffre d'affaires), l'impression numérique (30%) et le grand format (10%). "Ce rapport était de 90/10/0 il y a encore trois ans. Je le vois évoluer vers 50/30/20 à l'avenir. L'offset devrait rester le département principal sur les cinq prochaines années. Nous avons bien réfléchi à notre stratégie et le mot d'ordre est clair: diversification. Proposer différentes technologies sous le même toit, voilà notre point fort. Nous sommes un acteur solide en offset avec nos trois presses, et nous avons en même temps su devenir l'une des plus grosses imprimeries numériques du pays. Pour le numérique, nous travaillons sur deux ou trois équipes. L'idée au départ était de faire migrer une partie du volume offset vers le parc de machines numériques, mais nous n'y arrivons pas parce que le volume numérique supplémentaire est trop important. Nous sommes forts dans les imprimés personnalisés", dit Claes. La stratégie de diversification semble logique, mais attention aux chausse-trappes, prévient-il. "Le niveau de qualité doit être bon dans tous les domaines ; notre réputation est liée à l'ensemble de nos activités. Toute l'organisation doit se mobiliser, autrement on met en danger des choses que l'on ne souhaitait pas risquer." Thijs Claes souhaite investir davantage dans les presses numériques, mais n'a pas la place nécessaire sur le site actuel de Leeuw-Saint-Pierre. Daddy Kate y avait emménagé en 2009. Mille mètres carrés supplémentaires avaient encore été construits sur le parking en 2018. "Ce site craque aux entournures. Trouver une solution au manque de place est l'un de nos plus grands défis du moment. Nous explorons différentes pistes. Mais il nous faut résoudre ce problème faute de quoi notre stratégie de diversification va en pâtir. Nous pouvons viser un chiffre d'affaires de trente millions d'euros l'an prochain", dit Thijs Claes. Le patron du groupe familial voit l'imprimé numérique comme un segment où l'entreprise peut offrir beaucoup de valeur ajoutée. "On parle ici à la fois d'innovation et d'informatique. Nous savons comment faire pour programmer une API ( Application Programming Interface, ndlr) entre nos systèmes et celui du client. Cela va plus loin que le seul imprimé. Les processus amont et aval figurent aussi dans notre offre. J'entends par là la gestion des données, l'automatisation et la logistique. Nous livrons par exemple les imprimés d'un détaillant européen sur trois mille points de vente en Europe. Les commandes, les livraisons et la facturation sont gérées via notre plate-forme IT. Pour régler tout cela, il faut une informatique solide." Un autre projet qui occupe la famille Claes concerne l'ancrage familial du groupe graphique. "Nous sommes une entreprise qui réfléchit à long terme", souligne Thijs Claes. "Nous voulons toujours exister dans cent ans en tant qu'entreprise familiale indépendante. Il peut toujours arriver que certaines circonstances vous forcent à vendre, mais notre ambition est de ne jamais en arriver là. Je trouve important que nous soyons toujours plus forts d'année en année." Daddy Kate est aux mains de Thijs Claes et de ses soeurs Sandra et Heidi, qui représentent la deuxième génération. "Nous sommes jeunes ; nous n'allons pas vendre. Nous pensons déjà à la troisième génération, ce qui procure beaucoup de sérénité au personnel", rassure Claes. Les actionnaires familiaux planchent sur une fondation qui distribuerait des certificats. "Le détenteur d'un certificat peut toucher des dividendes, mais sans avoir de droit décisionnel", explique Thijs Claes. Une fondation peut être une réponse aux problèmes typiques de la troisième génération. "Dans une troisième génération, les écarts d'âge peuvent être importants. Il y a plus d'éparpillement. Aujourd'hui, ils sont huit: le plus âgé à 16 ans et le benjamin est né il y a quelques semaines. À un certain moment, certains actionnaires souhaitent se désengager alors que les autres n'ont pas les moyens financiers de racheter leurs parts, par exemple. L'entreprise doit alors être cédée d'un bloc et beaucoup d'affaires familiales n'y résistent pas. Ce dont nous entendons préserver la famille mais aussi la société. La fondation et l'entreprise sont une et indivisible", conclut Claes.