Chaque matin, lorsqu'elle quitte son appartement, deux écouteurs relient Charlotte à un autre monde sonore et l'aident à traverser la monotonie des longues minutes en tram en direction du travail. Ce matin, elle écoute le premier épisode de Salade Tout, un nouveau podcast qui décortique joyeusement les tendances alimentaires en Belgique. Plus qu'une simple rediffusion d'une émission radio, Salade Tout est ce qu'on appelle un podcast natif : un contenu sonore conçu et réalisé uniquement pour le Web et les applications mobiles.
...

Chaque matin, lorsqu'elle quitte son appartement, deux écouteurs relient Charlotte à un autre monde sonore et l'aident à traverser la monotonie des longues minutes en tram en direction du travail. Ce matin, elle écoute le premier épisode de Salade Tout, un nouveau podcast qui décortique joyeusement les tendances alimentaires en Belgique. Plus qu'une simple rediffusion d'une émission radio, Salade Tout est ce qu'on appelle un podcast natif : un contenu sonore conçu et réalisé uniquement pour le Web et les applications mobiles. Cette nouvelle série belge est l'un des deux projets retenus l'année dernière par la RTBf et la Fédération Wallonie-Bruxelles suite à leur appel lancé " pour soutenir les jeunes créateurs qui souhaitent raconter des histoires sur le Web de façon originale, sonore et immersive, afin de leur offrir un nouvel espace de diffusion " (sic). Auvio, la plateforme digitale de la RTBF, mais aussi les incontournables iTunes, YouTube et SoundCloud, sans oublier les applications mobiles d'écoute, permettent d'accéder aux épisodes de Salade Tout. " Le podcast fait partie de l'avenir de l'audio, explique Jean-Paul Philippot, administrateur général de la RTBf. Ce qui m'intéresse, c'est de toucher un public qui n'écoute pas nécessairement la radio. Ce public digital native n'a peut-être même plus de référence à la radio, mais il est consommateur de produits audio. Voilà pourquoi notre objectif est d'investir davantage dans le podcast natif. Nous devons en faire un outil de conquête. " Aujourd'hui, le podcast est devenu un média à part entière et sa consommation colle parfaitement au style de vie connecté et mobile des nouvelles générations. Le format audio permet de combler les moments creux passés en voiture ou les transports en commun, mais aussi d'enrichir les heures dédiées aux tâches ménagères ou à l'exercice physique. À la RTBf, principal fournisseur francophone belge de podcasts, plus de 9.000 podcasts ont été mis en ligne ces dix derniers mois et ont généré plus de 5 millions d'écoutes. Le podcast séduit également d'autres acteurs du paysage médiatique désireux de capter une nouvelle audience par la voix. Souffrant de l'érosion des ventes des journaux et magazines imprimés, de plus en plus de titres de presse écrite s'intéressent à ce nouveau support d'information sonore, d'autant plus que les enceintes connectées se multiplient dans les foyers. Indice révélateur de l'intérêt que suscitent aujourd'hui les podcasts dans le monde de l'édition : en décembre dernier, le groupe Les Echos-Le Parisien est entré au capital de la société Binge Audio, le premier pure player français des podcasts. Employant une quinzaine de personnes, Binge Audio revendique un million d'écoutes par mois. En Belgique francophone, les expériences sonores menées par de grands groupes de presse ne sauraient tarder. Grâce au fonds Digital News Innovation de Google visant à soutenir la presse écrite dans sa révolution digitale, les groupes Rossel ( Le Soir, Sudpresse) et IPM ( La Libre, La Dernière Heure/Les Sports) ont obtenu une bourse de 400.000 euros pour mener à bien leur projet Askinfo. Les deux groupes de presse concurrents ambitionnent de développer une plateforme commune permettant de distribuer des articles de presse sous un format audio via les ordinateurs, tablettes, smartphones et enceintes connectées. Les éditeurs de presse ne veulent pas laisser le monopole de la voix aux seules chaînes de radio. Les marques se lancent aussi à l'assaut des podcasts natifs. Certaines s'associent à un programme existant, d'autres ont l'audace de créer leur propre podcast pour toucher une nouvelle audience ou créer le buzz. Exemple : l'opérateur Orange qui a récemment lancé sa première série sonore Hello demain, produite par l'agence Havas Paris. " Les marques ont de plus en plus de mal à être audibles dans la vie de tous les jours, constate Julien Carette, PDG de l'agence Havas Paris. La voix permet de chuchoter à l'oreille du consommateur et de revenir à une clé de notre métier de base qui est de raconter des histoires. C'est un nouveau terrain d'expression pour les créatifs qui offre une proximité que l'on retrouve difficilement dans les autres formats publicitaires. " En France comme en Belgique, le podcast cherche encore son modèle économique et peine à séduire les annonceurs, faute d'indicateurs de mesure performants. Certes, les podcasts commencent à entrer dans les plans stratégiques des agences médias, mais il s'agit plutôt d'opérations rares et ciblées. Eric Adelbrecht, homme de radio et conseiller auprès de l'administrateur délégué chez RTL Belgique, analyse : " Un vrai changement de paradigme s'opère et les groupes de presse investissent le terrain de l'audio. Le problème reste la monétisation, mais les plateformes technologiques développent des outils qui vont mesurer la consommation de podcasts en temps réel. " Francis Goffin, consultant radio et conseiller spécial auprès de l'administrateur général de la RTBf, renchérit : " Le marché de la mesure n'est pas encore mature chez nous et les annonceurs attendent, faute de chiffres fiables. Il y a toutefois un véritable phénomène de l'audio qui est déjà majeur aux États-Unis et qui commence à déferler en Europe. On est au début d'une histoire et on assiste à un emballement créatif. Le développement des plateformes spécialisées et des assistants vocaux crée aujourd'hui un cercle vertueux autour du podcast. "