Que de chemin parcouru pour la Sign & Print Expo depuis la première édition, au début du siècle, de ce qui s'appelait encore la Grafische Vakbeurs. L'initiative était venue en son temps du Néerlandais Henny van der Most, auto-entrepreneur à succès qui avait racheté des halls événementiels en différents endroits du pays. Le salon avait connu des débuts modestes à Hardenberg, commune reculée de l'est des Pays-Bas, et il était combiné avec un salon professionnel des articles de bureau. Ce qui n'a pas empêché l'évènement d'Hardenberg de rapidement devenir la bête noire du grand Grafivak, qui se tenait au RAI d'Amsterdam. Pour les éditions qui allaient suivre, la Grafische Vakbeurs s'est de plus en plus souvent déplacée vers l'Evenementenhal de Gorinchem, à la situation plus centrale, prenant de l'ampleur à chaque fois.
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Que de chemin parcouru pour la Sign & Print Expo depuis la première édition, au début du siècle, de ce qui s'appelait encore la Grafische Vakbeurs. L'initiative était venue en son temps du Néerlandais Henny van der Most, auto-entrepreneur à succès qui avait racheté des halls événementiels en différents endroits du pays. Le salon avait connu des débuts modestes à Hardenberg, commune reculée de l'est des Pays-Bas, et il était combiné avec un salon professionnel des articles de bureau. Ce qui n'a pas empêché l'évènement d'Hardenberg de rapidement devenir la bête noire du grand Grafivak, qui se tenait au RAI d'Amsterdam. Pour les éditions qui allaient suivre, la Grafische Vakbeurs s'est de plus en plus souvent déplacée vers l'Evenementenhal de Gorinchem, à la situation plus centrale, prenant de l'ampleur à chaque fois. Le succès de la formule Hardenberg-Gorinchem tenait surtout au fait que l'organisateur chouchoutait ses exposants et gâtait ses visiteurs. Pas de grandes premières ; l'accent était surtout mis sur la rencontre. Aux antipodes du RAI d'Amsterdam et de ses formulaires, restrictions et coûteuses options supplémentaires, Gorinchem a opté pour le service et une approche no-nonsense. À Amsterdam, le visiteur devait payer chérot sa place au parking et faire longuement la file pour un café au prix aussi salé qu'il était insipide. À l'Evenementenhal, en revanche, collations et boissons étaient gratuites, et le nombreux personnel présent assurait un service rapide. Le parking aussi était compris. Cette approche centrée sur l'accueil a permis à la Grafische Vakbeurs de s'imposer de plus en plus comme un évènement-réseau accessible, tandis que Grafivak s'en tenait à son image commerciale et élitaire. Un choix malheureux, comme on l'a vu par la suite. Face à la baisse de son visitorat et au désintérêt croissant des exposants, Grafivak a jeté l'éponge en 2006. Le déclin du salon amstellodamois a aussi eu d'autres raisons. Au tournant du siècle, l'industrie s'est trouvée confrontée à un grand bouleversement. Les constructeurs de presses conventionnelles reculaient d'année en année, ce qui n'a pas fait les affaires de Grafivak. Pendant ce temps-là, les salons d'Hardenberg et de Gorinchem profitaient de l'essor de fabricants d'imprimantes tels que Canon, Ricoh, HP, Xerox, Xeikon et Konica Minolta. Après des débuts modestes avec des stands standard, les fournisseurs d'imprimantes ont commencé à voir plus grand chaque année. Le salon de Gorinchem s'est en outre avéré relativement insensible aux fluctuations conjoncturelles. Même pendant le ressac économique des années 2008 à 2014, il a continué d'attirer les visiteurs tout en réussissant à convaincre les fournisseurs de participer. Le mot "Sign" est en outre venu s'ajouter au nom du rendez-vous, reflet de la présence de plus en plus appuyée du secteur de la signalétique dans les allées. L'intérêt porté par les entrepreneurs graphiques à une activité complémentaire dans le grand format n'y était pas non plus étranger. Après le rachat des halls évènementiels par le géant des foires commerciales Easyfairs en 2016, le "Sign" est devenu le thème conducteur du salon, rebaptisé Sign & Print Expo. Son caractère a évolué sur certains aspects mais les fondamentaux sont restés. Si le parking est désormais payant, la formule a été largement préservée. Depuis que le directeur Rowdy van den Nieuwenhuizen a repris l'interprétation thématique à son compte, l'accent est mis plus ostensiblement sur le caractère créatif de la branche. Le millésime 2019 avait encore consacré un équilibre entre signalétique et imprimé, avec les stands imposants de Ricoh, Canon et Konica Minolta, qui avaient activement contribué à donner forme au thème retenu cette année-là: l'art urbain. Un spin-off de l'évènement s'est encore tenu en 2020 sous l'intitulé Sign & Print Festival. Avec la menace imminente du coronavirus, sa mise en route a été chaotique, l'expo ayant même dû être écourtée pour cette même raison. Sign & Print Expo a pu redémarrer en 2022, mais le visiteur venu voir des stands graphiques est resté sur sa faim. Le salon de Gorinchem est désormais un évènement quasi-exclusivement dédié à la signalétique, avec quelques accents graphiques ci et là. Un développement qui montre qu'il évolue avec son temps et qui a le mérite de faire la clarté pour le visiteur. Celui qui fait le déplacement à Gorinchem sait désormais à quoi s'attendre. Cette édition restera marquée par le partenariat avec Fespa, lequel s'est concrétisé dans un concours d'habillage de véhicules organisé dans The Wrap Zone. La poule néerlandaise des World Wrap Masters a ainsi été remportée par Patrick Vermeulen, de Dutch Customs. Le vainqueur représentera les Pays-Bas aux World Wrap Masters Europe, qui se dérouleront pendant la FESPA Global Print Expo de Berlin (les 31 mai et 1er juin). Tous les exposants n'avaient pas été aussi enthousiasmés par le thème Museum of visual communication. Ne sous-entendait-il pas que l'industrie serait obsolète et n'aurait plus sa place qu'au musée? Mais ce n'est naturellement pas ainsi que l'organisateur le voyait. Tout comme lors des deux éditions précédentes, son souhait était de mettre en avant l'aspect créatif du secteur. Un sujet qui mérite certainement que l'on s'y attarde. Car le salon attire toujours des visiteurs issus du secteur créatif, lequel joue un rôle déterminant dans les évolutions de l'industrie du sign & print. Ricoh, Konica Minolta et Xerox ont brillé par leur absence. Amstel Graphics, en son temps pilier de la Grafische Vakbeurs avec un large choix d'équipements de finition, était revenue avec un stand modeste. Print.com, qui manque rarement un évènement, était donc, comme il se doit, de la partie. Le spécialiste de l'enveloppe et de l'emballage Dortland & Van Beem se sentait chez lui au salon, disait-il. Canon, qui avait souvent déclaré forfait par le passé, avait choisi pour cette fois de se présenter uniquement sur les stands de ses distributeurs: le Belge Pantoon et les Néerlandais Spandex et Tripa. Canon avait montré à la Fespa de 2021 une très spectaculaire "Wallpaper Factory", qui avait produit des papiers peints personnalisés pendant toute la durée de l'expo. Conforté par le succès d'Amsterdam, le fabricant d'imprimantes entend bien réitérer l'expérience à la Fespa de Berlin, en juin prochain. Les partenaires de Canon avaient surtout mis l'accent à Gorinchem sur les emballages, avec des machines des séries Colorado et Arizona, ainsi que sur la technologie UVGel. Pantoon montrait la production de cartons pour une marque de bière. Les modèles HP étaient eux aussi exposés uniquement chez des partenaires. Chez Repromat, par exemple, qui présentait la HP Pagewide XL Pro comme solution polyvalente centrée sur la production de posters. La configuration est très évolutive et elle peut imprimer aussi bien sur des supports en rouleau que sur des feuilles ou des panneaux. Repromat la destine surtout aux petites entreprises et imprimeries désireuses d'ajouter des productions rapides en relativement petites séries à leur offre. Les prestataires qui prennent le pli de produire des (très) petits tirages d'emballages sont rapidement confrontés à des défis de finition. Ainsi l'automatisation de la production de boîtes entraîne-t-elle souvent de lourds investissements dans de grosses machines. Mais pour les petits tirages, de telles dépenses sont en général un excès de bien. Le distributeur Rotagraphic a surfé intelligemment sur cette vague avec la présentation de la Körtgen FK 3500, une plieuse-colleuse dont le faible encombrement constitue un atout supplémentaire. Avec une longueur de cinq mètres, la machine occupe en effet relativement peu de place. On peut attirer le visiteur sans nécessairement déballer des innovations ou de grandes premières. La preuve chez Zünd qui proposait des démonstrations de sa G3 M-2500. Cette table de découpe date déjà de 2008 et elle était déployée au salon pour la découpe et le fraisage de panneaux de fibres. Le personnel du stand s'en servait pour fabriquer des tabourets avec du texte fraisé et des lampes design. L'ambition n'était pas de concurrencer l'industrie du bois, mais juste de fournir un très bel exemple des multiples possibilités offertes par le secteur du sign & display. Le visiteur créatif qui empruntait l'escalator menant au premier étage pouvait se régaler en découvrant "la" sensation du salon: Printing Wonderland. Probo, fabricant de signalétique de Dokkum (Pays-Bas), y avait construit un gigantesque décor illustrant toutes les applications qu'il est en mesure d'offrir. Ce décor délimitait différents espaces proposant à chaque fois une application différente. À commencer par une salle entièrement blanche, censée représenter un monde sans imprimé. En poussant ensuite l'une des deux portes, on accédait à l'espace suivant, rempli de couleurs et d'impressions. Le message sous-jacent était, semble-t-il, que l'impression grand format peut égayer n'importe quel endroit: salle de bain, piscine à boules ou "peepshow" ludique, et ce avec des matériaux tels que du papier peint, du carton ondulé, des panneaux et du textile - rien n'avait été oublié. La manière dont Probo avait cantonné sa propre marque en arrière-plan était tout aussi remarquable. L'expérience avait plus d'importance que le nom de l'exposant, de sorte que le message passait encore mieux. Les possibilités de panneaux acoustiques imprimés, applications de feuilles, étiquettes et vinyles de sol étaient très joliment déclinées. René de Heij, directeur de Probo, était présent en personne pour expliquer l'idée à la base du stand. "Nous parlons beaucoup dans l'industrie de tout ce qui ne va pas, mais en attendant, nous donnons de la couleur au monde. Sans imprimés, tout est morne et gris. À nous de le rappeler plus souvent." En se promenant à travers Printing Wonderland, on voyait clairement à quel point la palette de Probo s'est élargie au fil du temps. Les revendeurs peuvent établir directement des connexions en ligne par le biais d'une API et automatiser ainsi les commandes passées à l'entreprise (via son site marchand). L'électronique imprimée (ou "intelligente") est possible à travers un partenariat avec Tapp.online. L'environnement n'était bien sûr pas oublié. Probo a mis au point un produit issu de la filière du recyclage sous le label "Sign Again". "Nous entrons dans une économie du recyclage", assure René de Heij. Même la réutilisation des décors avait fait l'objet d'une réflexion préalable. Celui-ci a été remonté dans son ensemble dans un endroit bien en vue du showroom de l'entreprise à Dokkum. Signe qui n'est pas anodin, Printing Wonderland voyait déambuler beaucoup de jeunes ; la preuve que Probo a clairement choisi la bonne direction pour l'avenir. Cette présentation était la résultante directe de la conception du salon telle que prônée depuis quelques années déjà par son directeur Van den Nieuwenhuizen: la créativité en tant que stimulant majeur de l'industrie. Les exposants peuvent faire une fête de chaque évènement - et donc certainement d'un salon dédié à la signalétique. Toujours est-il que Probo a placé la barre fort haut pour les prochaines éditions. Le succès de Printing Wonderland a quelque peu éclipsé les autres activités logées au premier étage, comme le programme d'exposés dans la salle de théâtre. Amener le visiteur à en pousser la porte - quelque peu dissimulée - a toujours requis des trésors d'ingéniosité. Mais avec le comité d'accueil festif de Probo - dont un énorme arc-en-ciel et un guichet haut en couleurs - qui attendait en haut du nouvel escalator central, cet accès était pratiquement devenu invisible. Sans nier que le salon de Gorinchem soit un authentique évènement-réseau, auquel les machines disponibles confèrent une solide valeur ajoutée, un programme de conférences consistant reste un élément important. L'industrie de la signalétique n'a probablement pas à se plaindre de son carnet de commandes, mais ce ne sont pas non plus les défis qui manquent pour l'avenir. L'élargissement de l'offre aux emballages soulève toute une série de nouvelles questions. La multiplication des écrans dans le paysage urbain soumet les applications signalétiques à forte concurrence. Elle pousse les signaléticiens à une réflexion plus approfondie en termes de flux de production, d'automatisation, de calcul du coût réel, de réduction des déchets, de recyclage et de matériaux écoresponsables. Autant d'aspects dont un fabricant de signalétiques a une approche totalement différente de celle de l'imprimerie traditionnelle. En assistant aux exposés, on pouvait certes, dans certains cas, voir et écouter des sujets également intéressants pour un spécialiste du sign, mais la plupart du temps, le visiteur se serait cru dans un salon graphique à l'ancienne. Les évolutions dans l'industrie de l'emballage sont bien sûr pertinentes, mais une présentation sur la conception des packaging "pilotée par les données" semble quelque peu hors de propos pour les petits tirages que l'industrie de l'emballage de la signalétique a à traiter. Idem pour des sujets comme le neuromarketing et la psychologie du design. De même, un exposé sur les hausses de prix est toujours une bonne idée, mais les calculs tarifaires très spécifiques des signmakers ne coïncident pas toujours avec ceux de l'imprimeur traditionnel. Jet d'encre ou offset? Cette fois encore, le débat incontournable ne manquait pas à l'appel. Tous les points sensibles habituels ont été abordés, comme le seuil de rentabilité, le choix des supports et les coûts par impression. Avec une exception tout de même. Une contribution positive au débat a été apportée par Frank Huigen, de chez Canon, qui - tout comme lors de sessions antérieures - fut le seul à accorder de l'attention à l'argument du développement durable: l'impression à la demande permet de réaliser des imprimés pertinents sur mesure, ce qui évite de jeter du papier inutilisé. Le débat s'est malgré tout assorti de la promesse explicite que cette discussion interminable finirait malgré tout par trouver une conclusion. Le mot de la fin n'a pas été dit dans la salle de théâtre, mais la cause était entendue depuis longtemps dans les allées de l'expo. Le monde de la signalétique dans son ensemble a résolument adopté les possibilités du jet d'encre. L'industrie du sign est peuplée d'entrepreneurs surtout pragmatiques, qui optent pour la technique et le mode de production qui conviennent le mieux à leur groupe de clientèle. Un débat "sérigraphie vs jet d'encre" n'intéresse personne. En déambulant parmi les stands à Gorinchem, on a pu voir une industrie qui n'est peut-être pas en avance sur les développements, mais qui peut certainement regarder l'avenir avec confiance.