En 2012, Benny Landa est en fait en avance sur la " Drupa du jet d'encre ". Ce qu'il concède d'ailleurs d'emblée : le procédé nanographique est encore dans sa prime jeunesse. Les pionniers de Memjet, en revanche, planchent depuis plus de dix ans déjà sur le développement d'une technologie jet d'encre maison, laquelle commence à porter ses premiers fruits. Contrairement à Landa, Memjet n'entend pas commercialiser des machines complètes. L'entreprise vise une clientèle d'OEM (Original Equipment Manufacturer) : des partenaires désireux d'intégrer la technologie Memjet dans leur propre équipement jet d'encre. Sont concernés dans un premier temps : les machines destinées à l'environnement bureautique et les petits systèmes de production. Mais les ambitions vont plus loin. L'idée est de conquérir les marchés du grand format, des étiquettes et des emballages et - certainement à un horizon de dix ans - le monde de l'offset traditionnel. Principal atout de Memjet : à la vitesse et à la qualité, son système associe une grande simplicité mais aussi des coûts inférieurs.
...

En 2012, Benny Landa est en fait en avance sur la " Drupa du jet d'encre ". Ce qu'il concède d'ailleurs d'emblée : le procédé nanographique est encore dans sa prime jeunesse. Les pionniers de Memjet, en revanche, planchent depuis plus de dix ans déjà sur le développement d'une technologie jet d'encre maison, laquelle commence à porter ses premiers fruits. Contrairement à Landa, Memjet n'entend pas commercialiser des machines complètes. L'entreprise vise une clientèle d'OEM (Original Equipment Manufacturer) : des partenaires désireux d'intégrer la technologie Memjet dans leur propre équipement jet d'encre. Sont concernés dans un premier temps : les machines destinées à l'environnement bureautique et les petits systèmes de production. Mais les ambitions vont plus loin. L'idée est de conquérir les marchés du grand format, des étiquettes et des emballages et - certainement à un horizon de dix ans - le monde de l'offset traditionnel. Principal atout de Memjet : à la vitesse et à la qualité, son système associe une grande simplicité mais aussi des coûts inférieurs.Et la promesse de Memjet n'a rien d'un bluff. En 2010 déjà, la société américaine Delphax avait conclu un partenariat avec Memjet en vue de passer de sa propre technologie (toner) monochrome à faisceau d'électrons (EB) à la polychromie jet d'encre. À la Drupa 2012, elle présente l'Elan 500, une imprimante feuille à feuille de format 45x64 " powered by Memjet ". Un avant-goût de l'avenir est également visible sur le stand de Canon : le concept de l'imprimante grand format Océ Velocity à technologie Memjet produit 500 posters de format A0 par heure (cette machine sera effectivement commercialisée en 2013 sous l'appellation Océ ColorWave 900). Parmi les autres partenaires OEM, on trouve notamment aussi Xanté (grand format), Colordyne (imprimantes d'étiquettes) et Fuji Xerox (grand format).Un certain scepticisme règne malgré tout, notamment concernant la durée de vie des têtes Memjet. Le choix d'une technologie thermique plutôt que piézoélectrique est aussi mis en question. De même que le fait que ces têtes ne fonctionnent qu'avec des encres aqueuses à colorants. Et comment l'entreprise espère-t-elle tenir le coup alors que des ténors comme Kodak, HP, Fujifilm, Canon, Ricoh et Konica Minolta se sont jetés dans la bataille avec leurs propres têtes jet d'encre ?L'histoire de Memjet trouve son origine dans des recherches faites en Australie dans les années 1990. Quelques gros cerveaux, issus notamment des laboratoires Canon, y ont développé l'idée d'une tête d'impression dotée de cinq canaux chromatiques. Ce cinquième canal initialement prévu en soutien d'une quadrichromie CMJN pouvait aussi servir à projeter une cinquième encre invisible, par exemple pour doter un imprimé d'éléments de sécurité n'apparaissant que sous une lumière spéciale. Cette application est restée sans suite, mais la société Silverbrook Research a néanmoins poursuivi le travail sur cette tête spéciale. Ce pour quoi elle utilise des " microsystèmes électromécaniques ", encore appelés " systèmes microélectromécaniques ". En anglais MEMS, d'où le nom Memjet. (À noter que d'autres fabricants de têtes d'impression ont également recours à la technologie des MEMS.) L'entreprise a déposé des milliers de brevets à son nom dans le domaine de la technologie d'impression au point de pouvoir présenter un premier prototype en 2009 au salon CES (Consumer Electronics Show) de Las Vegas, sous licence de ce qui s'appelait encore " Memjet Home and Office ". Cette machine imprimait un A4 couleur par seconde, une vitesse due notamment à la tête d'impression spéciale de Memjet.Cette technologie est au coeur du système d'impression de Memjet : la tête " page-wide " mesure plus de 22 cm. Contrairement à celles de pratiquement toutes les autres imprimantes, elle ne doit pas faire constamment des allers-retours. Elle peut projeter des encres de quatre couleurs sur la pleine largeur d'un A4 sans se déplacer. Pour les imprimantes de production ou grand format, il suffit de juxtaposer plusieurs têtes sans raccord jusqu'à une largeur de 106,7 cm.La Memjet est une tête thermique DoD, c'est-à-dire utilisant le principe de la " goutte à la demande ". Les puces nécessaires sont fabriquées par une technologie MEMS. L'originalité tient à la manière spéciale dont Memjet parvient à aligner onze de ces puces : chacune possède cinq canaux couleurs desservis par 1 280 buses chacun, soit un total de 70 400 buses par tête. (Un exemple à titre de comparaison : la tête Stream à base de MEMS montrée par Kodak à la Drupa 2012 faisait 10,8 cm de large et comptait 2 540 buses.) La tête éjecte 774 millions de gouttelettes d'encre de 1,2 picolitre par seconde, et produit ce faisant une résolution de 1 600 dpi (Memjet fournit aussi l'encre et le système de commande de la tête). Ce qui constitue encore et toujours une " performance inégalée " sur le marché, assure le fabricantCette première génération de tête Memjet, désormais baptisée " Versapass ", a reçu la compagnie de la " Duralink " en 2017. Depuis lors, le fabricant s'attèle à convaincre les partenaires existants et potentiels de travailler avec des Duralink - non sans résultats. " Nous avons 20 entreprises désireuses d'en équiper leurs machines pour la fin de cette année ", déclare à l'époque Eric Owen, general manager de Memjet, responsable du marché " commercial press ". L'homme est un transfuge de Kodak, où il a passé 22 ans et été étroitement impliqué dans les évolutions dans le domaine du jet d'encre. Il a rejoint Memjet en 2017 pour s'occuper de la nouvelle technologie Duralink. " La Duralink s'inscrit peut-être dans le prolongement de la Versapass, mais il s'agit en même temps d'un produit totalement nouveau ", explique Owen lors d'une visite de Nouvelles graphiques au siège de San Diego (États-Unis). La nouvelle structure lui assure une durée de vie prolongée. La tête fonctionne désormais avec des encres aqueuses pigmentées, ce qui élargit le champ des applications possibles. En outre, les cinq canaux de chaque tête sont à présent tous utilisés pour la même couleur. Avec à chaque fois cinq buses alignées l'une derrière l'autre, le risque de voir une ou deux buses bouchées laisser une ligne blanche disgracieuse sur l'image imprimée est pratiquement exclu.Owen dit avoir en deux ans parlé des possibilités de Memjet et de Duralink avec 157 parties actives dans l'industrie, allant de constructeurs de presses à des fabricants d'imprimantes. " Il n'est pas de grand nom avec lequel nous ne soyons pas en pourparlers. Avec notre technologie à jet d'encre thermique, nous proposons quelque chose de complètement différent de l'offre de tous les autres acteurs qui travaillent quasi exclusivement avec du piézo. Seules HP et Epson font quelque chose de similaire, mais elles destinent ces têtes à un tout autre segment de marché que nous. Avec Duralink, nous sommes aujourd'hui en mesure d'offrir une alternative intéressante dans le domaine de la technologie de jet d'encre aqueuse - nos têtes ne conviennent pas pour les encres UV. "Memjet est sur ces entrefaites devenue une société de 350 salariés, qui compte des implantations aux États-Unis, en Irlande, à Taïwan, en Malaisie et en Australie. Plus de 12 000 systèmes à technologie Memjet ont déjà été installés dans le monde. Par exemple, la rotative Webjet de Konica Minolta ou la presse à étiquettes Smartfire de Gallus sont équipées de têtes Memjet. Et Owen est persuadé qu'il y en aura rapidement beaucoup d'autres dans la foulée du lancement de produit attendu à la Drupa 2020.C'est que Memjet conserve un atout dans sa manche. Au LabelExpo de Bruxelles fin septembre, la société prévoit de présenter sa troisième génération de têtes d'impression : la Duraflex. Cette tête combine les caractéristiques de ses devancières : à l'instar de la Versapass, elle est multicouleurs, et elle utilise des encres à pigments, comme la Duralink. Plus la promesse de pouvoir bientôt imprimer avec plus que les quatre encres standard de la quadrichromie. Avec la Duraflex, Memjet vise des applications dans le segment de la " production légère ", dont aussi les modèles d'entrée de gamme dans le domaine des presses à étiquettes. Les petits tirages d'emballages sont aussi possibles, mais le marché de remplacement du toner par le jet d'encre dans les systèmes multifonctions du segment bureautique est également à portée. Eric Owen le martèle une fois encore : " Memjet n'a rien d'une mode. Sa technologie est éprouvée. "MGI est la première à avoir déjà fait savoir qu'elle optait pour les têtes Duralink. Cette pionnière du jet d'encre d'origine française, dont Konica Minolta détient à présent plus de 40 % des parts, s'est distinguée à la Drupa 2016 avec une version concept de son AlphaJet. Cette presse numérique est construite comme un " carrousel multiplateaux " convenant pour des supports de version B1 jusqu'à pas moins de 15 cm d'épaisseur. Chaque feuille (ou plaque) à imprimer est acheminée par un système de transport aspirant et présentée aux différentes unités pour l'impression numérique ou l'ennoblissement (vernis ou dorure, par exemple). MGI justifie son choix des têtes Duralink de Memjet sur l'une des stations par leur résolution de 1 600 dpi et leur durée de vie prolongée. Les têtes sont en outre facilement interchangeables en cas de besoin. Le fait qu'elles utilisent des encres à l'eau pigmentées a aussi son importance. Celles-ci ont la préférence par rapport aux encres UV pour la production d'emballages (alimentaires).Après la démo de la très futuriste AlphaJet en 2016, la première installation bêta aura lieu fin 2019 pour les tests pratiques. Deux configurations d'AlphaJet seront visibles à la Drupa 2020 : une chez MGI et l'autre sur le stand de Konica Minolta.