La vie est parfois bizarre et l'histoire de RAFF Plastics en est un nouvel exemple. Quand Raf Van der Perre a commencé la production de compounds de PVC en 1976, le développement durable n'était pas sa préoccupation première. Sa motivation était purement économique: ce matériau était alors en plein essor. Il peut pourtant se targuer aujourd'hui d'être un pionnier du recyclage: le fruit de son inventivité et, face à l'adversité, de sa volonté de faire de nécessité vertu. En effet, cinq ans à peine après le démarrage de sa petite entreprise, un violent incendie réduisit tout en cendres. Et pas question d'une relance rapide, faute d'une couverture suffisante auprès des assurances.
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La vie est parfois bizarre et l'histoire de RAFF Plastics en est un nouvel exemple. Quand Raf Van der Perre a commencé la production de compounds de PVC en 1976, le développement durable n'était pas sa préoccupation première. Sa motivation était purement économique: ce matériau était alors en plein essor. Il peut pourtant se targuer aujourd'hui d'être un pionnier du recyclage: le fruit de son inventivité et, face à l'adversité, de sa volonté de faire de nécessité vertu. En effet, cinq ans à peine après le démarrage de sa petite entreprise, un violent incendie réduisit tout en cendres. Et pas question d'une relance rapide, faute d'une couverture suffisante auprès des assurances. "Mon père n'était pas homme à baisser les bras et il se mit à réfléchir à des manières de tout reconstruire", dit Caroline. "Et c'est ainsi qu'a jailli l'idée géniale: plutôt que des matières 'vierges', il allait utiliser des 'déchets'. On parle ici des chutes de production des fabricants de produits en PVC, qui partaient tout simplement à l'incinérateur. Mon père s'est arrangé pour pouvoir les enlever gratuitement. Ne devant pas acheter sa matière première, il pouvait produire des granulats meilleur marché. Mais le recyclat restait mal vu, malgré tout: pour les fabricants, c'était toujours du déchet. Plusieurs clients ont toutefois fini par se laisser convaincre par le prix intéressant, tant et si bien que RAFF Plastics a rapidement connu une croissance soutenue." Transformer des déchets en granulats ne coulait pas de source à l'époque. Les machines n'existaient pour ainsi dire pas. Raf Van der Perre a commencé alors à en bricoler une à partir de matériel d'occasion. Et il y a merveilleusement réussi... Mieux encore, il est parvenu à mettre au point plusieurs installations de manière à pouvoir traiter différents types de déchets plastiques. Ce qui a finalement débouché sur la création d'une seconde entreprise appelée Socaplast, dont il continue aujourd'hui (à 71 ans) d'assurer la gestion quotidienne et qui possède depuis une usine aux États-Unis. Cette société a été la première au monde à mettre au point un processus de production centré sur le recyclage du PVB (polybutyral de vinyle): le film inséré dans les pare-brise feuilletés des voitures pour éviter les éclats de verre en cas d'impact de gravillon ou d'accident. RAFF Plastics est pilotée depuis 2012 par sa fille Caroline, qui poursuit la success story avec flair et conviction. En 2023, l'entreprise se classe parmi les principaux recycleurs belges de plastiques durs. RAFF Plastics emploie 70 salariés, répartis entre le quartier général à Houthulst et le site originel de Londerzeel. Environ 70 000 tonnes de plastique y sont traitées chaque année. "Aujourd'hui, nous tirons notre 'matière première' essentiellement de déchets ménagers: une adaptation que j'ai introduite relativement peu de temps après avoir pris les rênes de l'entreprise", dit Caroline. "Une décision motivée à la fois par la hausse de la demande côté clients et la diminution de l'offre de déchets de production côté industrie. D'un côté, les fabricants se sont mis eux aussi à recycler ces plastiques - pour des raisons d'abord économiques, ensuite également écologiques. De l'autre, nous avons assisté à cette époque à un important déplacement de l'activité vers les pays de l'ancien Bloc de l'Est." Cette décision de passer à des déchets de post-consommation a naturellement eu un impact sur les processus de production de RAFF Plastics. Explication de Caroline Van der Perre: "Cette ressource est très hétérogène et souvent souillée. Nous avons donc dû adapter notre parc de machines. En équipant notamment nos extrudeuses de filtres laser qui assurent un meilleur filtrage du matériau. Nous les dotons également d'un double dégazage, destiné à enlever l'humidité des déchets qui nous sont livrés lavés. Ce procédé contribue aussi - partiellement - à débarrasser les emballages de leurs impressions." L'entreprise traite aujourd'hui les PEHD (polyéthylène haute densité), PP (polypropylène), PS (polystyrène) et PVC (chlorure de polyvinyle) collectés par la filière du sac bleu et des déchetteries. "Ils proviennent à 40% d'emballages plastiques", estime Caroline. "Quelque 30% du recyclat retourne à ce secteur ; le reste est acheté par des fabricants d'articles ménagers et horticoles: seaux, mannes à linge, poubelles, jardinières, plateaux de plantation, etc." Si la croissance a toujours été au rendez-vous dans l'histoire de RAFF Plastics, l'accélération est relativement forte depuis cinq ans. "C'est une tout autre manière de travailler", dit Van der Perre. "Après avoir dû faire face à la suspicion, voire au dénigrement, nous voyons désormais les entreprises faire la file pour acheter nos produits. Fini le temps où elles s'adressaient à nous pour des raisons purement économiques. Nous constatons un intérêt sincère et généralisé pour l'industrie du recyclage. Une évolution particulièrement positive, non seulement pour l'entreprise, mais aussi pour l'environnement en général. Car si RAFF Plastics s'est lancée dans le recyclage pour des motivations purement économiques, nous sommes malgré tout fiers aujourd'hui de pouvoir apporter notre pierre à la préservation de la planète. Nous espérons d'ailleurs, dans ce contexte, pouvoir traiter encore d'autres flux de déchets à relativement court terme. Je pense en première instance aux plastiques marins." L'entrepreneure ne se contente en tout cas pas de rêver et lance une nouvelle activité dès ce mois d'avril: le recyclage des big bags. Un projet partiellement subsidié par l'Agence flamande pour la gestion des déchets (Ovam). "En 2020, nous nous sommes trouvés en rupture d'approvisionnement de matières premières pour cause de Covid-19. Ce qui nous a poussés à chercher de nouvelles possibilités de recyclage. Et les big bags se sont imposés comme une évidence. Cette solution est utilisée dans de nombreux secteurs partout dans le monde. Nous avons mis au point un procédé permettant de convertir ce type 'd'emballages' usagés en granulat pouvant servir de matière première à de nouveaux exemplaires. Même si nous sommes encore loin d'un modèle entièrement circulaire dans lequel une réutilisation à 100% serait possible. Disons que même 30 à 40% constitueraient déjà une belle avancée. Pour l'environnement et pour notre entreprise, car cette nouvelle activité nous engage dans une toute nouvelle voie, à savoir le recyclage des plastiques souples. Ce qui ouvre naturellement de très nombreuses perspectives sur le plan du traitement des déchets."