Jojo Siwa n'a que 17 ans. Ainsi que Wikipédia nous l'apprend, cette native d'Omaha, dans l'État américain du Nebraska, est à la fois danseuse, chanteuse et actrice et elle réalise des vidéos pour le Web (une " youtubeuse ", comme on dit). Fameux palmarès déjà pour une ado. Mais pourquoi devrais-je connaître Jojo Siwa, direz-vous ? Parce que cette jeune fille, qui arbore dans ses cheveux un noeud Minnie-Mouse bariolé comme marque de fabrique, compte 8,8 millions de followers sur Instagram et 10,3 millions d'abonnés à sa chaîne YouTube. Et en plus, elle publie des livres. De vrais, dûment imprimés, qui tirent jusqu'à 2 millions d'exemplaires. Siwa est une authentique superstar dans la catégorie 12-20 ans.
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Jojo Siwa n'a que 17 ans. Ainsi que Wikipédia nous l'apprend, cette native d'Omaha, dans l'État américain du Nebraska, est à la fois danseuse, chanteuse et actrice et elle réalise des vidéos pour le Web (une " youtubeuse ", comme on dit). Fameux palmarès déjà pour une ado. Mais pourquoi devrais-je connaître Jojo Siwa, direz-vous ? Parce que cette jeune fille, qui arbore dans ses cheveux un noeud Minnie-Mouse bariolé comme marque de fabrique, compte 8,8 millions de followers sur Instagram et 10,3 millions d'abonnés à sa chaîne YouTube. Et en plus, elle publie des livres. De vrais, dûment imprimés, qui tirent jusqu'à 2 millions d'exemplaires. Siwa est une authentique superstar dans la catégorie 12-20 ans. Siwa compte parmi les youtubeurs et instagrammeurs qui réussissent à prolonger leur succès en ligne jusque dans le monde analogique. Ces " booktubeurs ", comme on les désigne, ne sont qu'une expression d'un changement en cours dans la consommation des médias. Autrement dit : une tendance. Et il y en a d'autres. Le Prof. Volker Jansen est le doyen du département Technologies postpresse à la Hochschule der Medien (HDM) de Stuttgart. Pour sa conférence introductive aux " Buchbindertagen 2019 ", il a passé en revue les tendances auxquelles l'imprimé est confronté aujourd'hui. Et celles-ci ont bien évidemment une influence sur la finition. Pour faire clair, il a montré une matrice reprenant, d'un côté, le marché de l'impression, et de l'autre, les évolutions en cours (voir illustration). Les trois principaux marchés aux yeux de Volker Jansen sont ceux de l'impression d'emballages, de l'impression commerciale et de l'impression industrielle. Les tendances dominantes sont les données variables, l'impression à la demande (PoD) et le segment des imprimés premium & intelligents. À l'interface de tous ces aspects naissent des applications et des exigences en matière de produits, sur lesquelles les prestataires de services d'impression doivent se concentrer. Internet est un moteur important de cette tendance - d'un côté à travers le commerce électronique qui offre la possibilité d'envoyer des créations individuelles et d'en commander la fabrication en ligne, et de l'autre, avec des applications comme la réalité augmentée, qui inscrivent le monde numérique dans le prolongement du produit imprimé. Volker Jansen se dit convaincu que de tels produits interactifs continueront de se développer encore plus à l'avenir, une fois que la 5G aura été introduite partout comme la nouvelle norme de l'Internet mobile. Dans ce contexte, l'impression commerciale n'a d'autre choix que de se muer en une activité orientée en ligne. " La combinaison des médias numériques avec des produits imprimés débouche sur une exploitation inédite et efficiente du marché, qui ne serait pas possible uniquement avec le digital et vice versa ", dit Volker Jansen. " Toute l'approche de la narration transmédia repose sur cette interaction : des histoires qui commencent dans un média et sont prolongées dans un autre. " Comme la saga d'Harry Potter, le héros de fiction qui a conquis toutes les plateformes. Ou encore les mailings interactifs, qui garantissent des taux de réponses supérieurs à ceux d'un e-mail ordinaire. Les " booktubeurs ", comme Jojo Siwa et ses pairs en ligne qui publient aussi sur papier, relèvent également de cette catégorie. Le développement des produits d'impression commerciale va se concentrer sur deux domaines majeurs selon Volker Jansen : le marché de masse et le segment premium. Dans un cas comme dans l'autre, la gestion des flux, des produits et des coûts jouera un rôle central. Condition sine qua non : disposer d'un flux de production fortement automatisé, d'une structure de coûts allégée reposant sur une chaîne d'approvisionnement bien organisée - ET d'une plate-forme d'e-commerce. Le marché de masse, prophétise Volker Jansen, sera de plus en plus caractérisé par des produits dominés par les grands fournisseurs en ligne. La diversité des articles proposés peut paraître énorme, mais leur complexité en elle-même est très réduite. Ces fournisseurs en ligne s'efforcent avant tout de diminuer leurs coûts de stockage et d'optimiser leur logistique. L'heure est à l'automatisation des flux de production industriels, le défi pour les prestataires de services d'impression et de finition étant d'arriver à jouer un rôle dans ces processus logistiques sophistiqués. Il est toutefois plus probable que ces ténors du commerce électronique investiront eux-mêmes dans les configurations machines nécessaires pour assurer la production des livres " à la demande " - sans plus faire appel à la sous-traitance. " Je pense que le nombre de ces grandes imprimeries typiques va diminuer ", a dit Volker Jansen. À côté des produits classiques destinés au marché de l'édition, d'autres découlent directement des médias sociaux. Le fichier en question est préparé et mis en ligne, après quoi les followers peuvent commander le produit fini sur Amazon. Autant dire que des tels modèles d'entreprise sont inimaginables dans un marché de masse individualisé sans une automatisation poussée et une plate-forme e-commerce à la hauteur. Une flexibilité extrême est également exigée du matériel : colleuses bénéficiant d'un apport optimal des blocs-livres, endosseuses interchangeables, stations capables de mesurer le format et l'épaisseur des livres, et systèmes de codes à barres. Impossible autrement de fabriquer de manière industrielle et totalement automatisée des livres de formats et épaisseurs variables - et qui plus est, au contenu individualisé. Cette automatisation des entreprises - prestataires de services d'impression ou fournisseurs en ligne - présente également un autre aspect. Pour réduire leurs coûts, elles ont de plus en plus tendance à engager du personnel temporaire - qui ne dispose pas du bagage technique. Tout au plus les travailleurs suivent-ils un bref écolage censé leur suffire pour desservir la machine. D'où un niveau d'exigences supérieur imposé aux machines, lesquelles doivent se régler automatiquement, offrir une conduite intuitive et être commandées par l'électronique. Idéalement, le système intégrera des algorithmes auto-apprenants. Le segment premium est tout aussi multiple - mais également relativement complexe, à l'inverse du marché de masse. " On pense à des catalogues et livres intelligents, à des plaquettes de prestige, à des livres de luxe en tirage limité, à des mailings de haute qualité partiellement fabriqués à la main, et naturellement aux brochures interactives ", énumère Volker Jansen. L'éventail s'étend des ouvrages reliés plein cuir et enrichis d'illustration sur papier à la cuve aux applications de la réalité augmentée dans les brochures commerciales. Ce qui, dans tous les cas, requiert savoir-faire et expertise, tout comme est indispensable une haute qualité de conseil au client. La croissance, Volker Jansen ne l'attend pas seulement du côté de l'impression commerciale. Il l'observe également dans le secteur de l'emballage, où elle est poussée non seulement par l'évolution démographique mais aussi (dans ce cas-ci également) par la multiplication des possibilités du numérique. L'augmentation du nombre d'isolés (ménages d'une seule personne) se remarque surtout au succès des emballages dits " de commodité ". Dans ce secteur, l'accent est mis sur la facilité d'utilisation, la diversité, l'augmentation de la productivité, des unités de conditionnement plus petites et une offre de goûts élargie. Selon les instituts de recherche, le marché des produits " convenience " devrait connaître une progression annuelle de 5 % jusqu'en 2030. Une croissance plus forte que la moyenne est même attendue dans certains nouveaux pays industrialisés, comme la Chine. " La classe moyenne chinoise, surtout, consomme les produits 'convenience' avec un enthousiasme croissant. " Et l'un des moteurs majeurs de cette croissance n'est autre que les canaux de vente en ligne. Les ménages unipersonnels achètent déjà massivement aujourd'hui via des applis mobiles - aussi bien sur le lieu de travail que sur le chemin de l'aller ou du retour à domicile. Une récente enquête sur la pertinence des produits imprimés dans le secteur de la santé et du bien-être pour le secteur de l'imprimerie semble dégager une tendance positive. Ce marché croît même plus rapidement que celui des produits " convenience ". Outre le design des produits, d'autres aspects comme la qualité d'impression des emballages, le matériel publicitaire, la dimension tactile et le choix des matériaux jouent un rôle prépondérant pour ce groupe-cible. Et puis il y a aussi l'image que les emballages sont censés véhiculer : sains et bien sûr vecteurs d'un facteur de bien-être élevé. En tout état de cause, le potentiel de croissance des emballages doit toujours être examiné dans un contexte mondial. Outre l'Allemagne, les pays qui signent la plus forte progression sont la Chine, l'Inde, les États-Unis, le Brésil et le Mexique. Si la masse des emballages augmente, la diversité des fonctions qu'un packaging est en mesure de remplir croît elle aussi. Le potentiel du " smart packaging " est énorme. Volker Jansen a fait, dans son exposé, la distinction entre emballages " actifs " et " intelligents ". Les emballages actifs " offrent de nouvelles fonctions qui leur permettent d'interagir avec le contenu emballé et ils peuvent contribuer à améliorer la durée de conservation des produits en question. " Ce qui nécessite concrètement que des substances soient ajoutées au produit emballé. Ou inversement, soient enlevées du produit ou de son environnement immédiat. L'élément actif peut être intégré dans l'emballage, par exemple sous la forme d'un habillage, ou lui être en quelque sorte annexé. Les emballages intelligents se distinguent par le fait qu'ils " communiquent " de l'une ou l'autre manière avec le monde extérieur dans le but d'offrir une valeur ajoutée. Ainsi, des capteurs surveillent, par exemple, l'état des denrées emballées et offrent des informations sur la durée de conservation, la température et d'éventuelles fuites. Ce pour quoi il est fait directement appel aux produits de l'électronique imprimée : piles, circuits conducteurs, antennes, couches électroluminescentes. D'autres applications sont imaginables, voire déjà utilisées : les boîtes de médicaments peuvent, par exemple, être dotées de puces RFID, de LED ou même de minuscules haut-parleurs. La prise du médicament est ainsi enregistrée et une alarme se déclenche en cas de non-respect de la prescription. Des puces NFC permettent de lire la notice explicative à l'aide d'un lecteur (smartphone), ou si nécessaire, de repasser commande du médicament le moment venu. De quoi simplifier sensiblement la vie des patients, en particulier des personnes âgées. Selon Volker Jansen, les experts sont unanimes à penser que le besoin d'information du consommateur continuera d'augmenter, et que dans ce contexte, les emballages communicants seront de plus en plus appréciés. Le consommateur est tout à fait bien disposé face à l'utilisation d'emballages intelligents, pour autant que la communication se fasse simplement. " Mais s'il lui faut encore télécharger des fichiers volumineux et introduire des mots de passe, ça n'ira pas. " L'un des thèmes d'avenir dont le secteur graphique doit se préoccuper en priorité est celui du développement durable. Ce qui fait automatiquement surgir le sujet du recyclage. Les quatre plus grandes puissances économiques - les États-Unis, la Chine, le Japon et l'Allemagne - sont aussi les pays où la consommation de papier est la plus forte. Ce quatuor attire plus de la moitié de la production papetière mondiale. Une bonne part de ce papier est utilisée par l'industrie de l'emballage. Mais si la consommation de papier devait augmenter dans d'autres pays encore, un problème de durabilité ne manquerait pas de se poser. La Chine à elle seule consomme 78 kg de papier par tête d'habitant et par an, soit le double d'il y a dix ans. Par ailleurs ce pays, pourtant le premier producteur de papier au monde, présente des chiffres de recyclage parmi les plus faibles. La consommation en Afrique représente actuellement 8 kg par an et par habitant, mais le continent africain aussi est un marché de croissance, qui peut progresser très vite selon Volker Jansen. On considère en général que la hausse annuelle sur le marché mondial du papier est d'environ 6 %. Impossible dans ces conditions d'encore fermer les yeux sur la problématique des ressources naturelles. Ce qui veut dire que la Chine, l'Inde, le Brésil, tout comme les pays africains, ont absolument besoin de stratégies et procédés de recyclage plus efficaces. Il faudra donc à l'avenir collecter et recycler davantage. Une forte croissance du secteur du recyclage est dès lors attendue pour la prochaine décennie, à partir du moment où l'Asie, et en particulier la Chine, commencera à son tour d'utiliser les emballages en plus grand nombre. D'où l'appel lancé par Volker Jansen : " Nous devons développer des solutions innovantes avant que les problèmes ne s'imposent. " Un défi qui peut aussi selon lui se muer en opportunité pour les petites entreprises. À elles toutefois de développer les concepts appropriés : " Alors, ces petites entreprises pourront rapidement devenir très grandes. "