Quelle est l'importance des emballages dans votre secteur?
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Quelle est l'importance des emballages dans votre secteur? Françoise Van Tiggelen: "Pas d'emballage sans produit. Contenant et contenu sont indissociables. Si bien que l'emballage fait partie intégrante du processus de développement du produit. C'est ainsi dans tous les secteurs et en particulier auprès de nos adhérents. Le périmètre de Detic s'étant sensiblement élargi, la problématique des emballages à laquelle nous sommes confrontés en tant que fédération professionnelle est extrêmement diverse. Dans la cosmétique, l'emballage est essentiellement lié à la durée de conservation et à la fonction de communication. Pour les produits d'entretien et les détergents, c'est la sécurité qui prime, tandis qu'avec les colles et les mastics, l'accent est mis sur la facilité d'utilisation. Les biocides mettent avant la sécurité, la facilité et la communication sur leur bon usage. Pour les aérosols, enfin, il est surtout question de confort d'utilisation: la bombe délivre le produit sous une forme très spécifique, par exemple, pour appliquer de très petites quantités en une couche homogène. Vous ne parlez que des emballages primaires? Van Tiggelen: "En effet. Mais notre secteur a naturellement recours à un large éventail d'emballages secondaires et tertiaires. Tout doit encore être stocké et transporté. Les emballages chez nous peuvent aller de jolies petites fioles en verre à des tubes et bombes aérosol en passant par des caisses en carton et des récipients géants. Devant la multiplicité des fonctions, nos membres doivent aussi prendre en compte les différents emballages dès la phase de développement." Quels sont les plus grands défis? Van Tiggelen: "Sans nul doute, le grand flou quant à l'évolution du cadre juridique. Il plonge nos membres dans l'incertitude et conduit à ce que certains nouveaux concepts soient mis de côté. L'industrie dans son ensemble ne peut plus réfléchir à long terme, ce qui est contreproductif. Que l'Europe ait résolu d'adopter un règlement, on ne peut que s'en réjouir, car toute harmonisation de la législation européenne est positive. Si ce n'est que le projet de la Commission était bancal dès le départ. Beaucoup d'améliorations ont été introduites depuis lors, mais elles n'ont fait que rendre le tableau encore plus complexe sur certains plans. Ainsi, des objectifs de recyclage ont été définis depuis un certain temps, mais tous les États membres ne les atteignent pas aujourd'hui. Et on parle entre-temps d'en fixer d'autres sur le contenu recyclé. La question est plutôt de savoir s'il y aura du recyclat en suffisance. En outre, l'ambiguïté est partout. On en est à se demander si Fost Plus et Valipac pourront poursuivre leur activité particulièrement efficace. Les ambitions au niveau européen sont-elles réalistes? Parfois, on se dit qu'on ne se rend pas compte en haut lieu qu'un processus industriel ne peut jamais être efficient à 100%: la perfection n'est pas de ce monde. Un processus qui nécessite différentes étapes conduit fatalement à des pertes de rendement. En outre, l'Europe va encore devoir concocter une législation secondaire d'une trentaine de documents (delegated acts and guidances - ndlr). Il est peu probable, à notre avis, que les délais seront respectés, ce qui ne fera que faire perdurer l'ambiguïté. D'autres problèmes auxquels vous êtes confrontés? Van Tiggelen: "Le sens à donner à un grand nombre de termes n'est hélas pas tout à fait clair. Ainsi, on ne sait pas clairement si les emballages de produits concentrés destinés à être allongés à l'eau peuvent être considérés ou non comme des "recharges". Le contenant en lui-même n'est en effet pas rechargeable et il n'est pas reconnu comme durable. Et ce alors qu'il offre une belle solution pour réduire fortement l'impact du transport. En outre, l'épaisseur des emballages ne peut pas être réduite indéfiniment: ils risquent en effet à la longue de ne plus pouvoir remplir de manière fiable leur fonction de récipient. Les initiatives de compactage dans l'industrie des détergents ont sensiblement réduit les volumes des produits, tout en rendant ceux-ci plus faciles à utiliser pour le consommateur. Les capsules pour la machine à laver et le lave-vaisselle sont de beaux exemples de dosages plus sûrs et de doses réduites pour un nombre de lavages comparable." Sur quoi vos adhérents misent-ils actuellement? Van Tiggelen: "Les emballages recyclables et contenant du recyclat ont indubitablement la cote. Même si les innovations dans ce domaine ne sont pas évidentes. Dans le secteur des cosmétiques, en particulier, les exigences contre la contamination sont très élevées, proportionnelles à celles applicables aux produits alimentaires. Recourir à un monomatériau est souvent impossible, par exemple. Nous constatons par ailleurs une insuffisance de capacités et de technologies de recyclage, ce qui sape partiellement les efforts de nos membres. Nous observons néanmoins beaucoup d'initiatives sur le plan des emballages secondaires et tertiaires. Je pense ainsi aux films plastiques pour le transport, qui sont collectés, recyclés et utilisés pour fabriquer des matériaux neufs destinés à une même application. On joue en outre toujours plus souvent la carte de la circularité et beaucoup de recherches sont consacrées à des plastiques qui ne sont pas pétrosourcés." Existe-t-il des différences selon les secteurs représentés par Detic? Van Tiggelen: "Certainement. Les défis et initiatives dans le domaine des emballages sont relativement diversifiés. La réglementation en matière de cosmétiques étant très stricte, il est très difficile d'employer autre chose que des plastiques vierges pour certains types de produits. L'application de papier ou de carton ne coule pas non plus de source: elle n'est possible que pour les produits secs, comme les savons. Sans oublier que ce secteur a aussi un impératif de visibilité et d'image. Celui des détergents et des produits ménagers est très sensible à l'impact environnemental, et c'est probablement celui qui a accompli les plus grandes avancées sur le plan du développement durable. Ce qui, on l'a dit, a débouché sur des produits concentrés, destinés à être dilués, et naturellement sur les capsules individuelles. Certains fabricants sont particulièrement créatifs. Une PME belge a ainsi mis récemment au point un capuchon à placer sur un pulvérisateur rempli d'eau. Un simple clic suffit à libérer le produit, qui est alors prêt à l'emploi. Un capuchon-recharge, en quelque sorte, qui pourrait bien créer une nouvelle tendance. Surtout dans ce secteur où la sécurité de l'utilisateur est prioritaire. On pense d'ailleurs aussi à des produits en poudre à dissoudre dans une bouteille d'eau". Et dans les autres secteurs? Van Tiggelen: "Le secteur des biocides est, lui aussi, strictement réglementé, singulièrement concernant le traitement des emballages vides, et donc leur réutilisation. Le législateur ne fait pas de distinction de types: tous les biocides sont dangereux. Autrement dit, il est interdit de jeter les emballages vides dans le sac bleu, ce qui en complique la collecte et le recyclage. Nous réfléchissons avec FostPlus et Valipac sur la possibilité de mettre une filière en place, mais ce n'est pas évident, car les quantités sont très faibles. Idem pour les colles et les mastics, qui sont eux aussi considérés, par définition, comme des déchets dangereux. Pareil enfin pour les bombes de polyuréthane. Nous voyons des entreprises faire des expérimentations avec des cartouches de mastic incorporant une fine membrane qui maintient le produit séparé de l'emballage. Ce qui permet de recharger celui-ci pour un usage ultérieur. Enfin, la législation, par définition, interdit la réutilisation des aérosols pour des raisons de sécurité. Ce secteur a entamé un processus de réflexion destiné à remettre en question cet état de fait, sur la base d'une approche de l'analyse de cycle de vie. Tous les emballages ne doivent pas être réutilisables, pour autant qu'ils puissent être recyclés. Mais s'il est techniquement possible de le faire sans augmenter l'impact sur l'environnement, pourquoi pas?"