Chaque année, pas moins de 4 000 camions chargés de papier approvisionnent le grossiste Igepa, à Aalter. L'entreprise ambitionne à présent de sortir 500 poids-lourds de la route en optant pour un transport par la voie d'eau. Pourquoi venir grossir les embouteillages alors que des péniches peuvent parfaitement faire l'affaire ? Igepa a sorti sa calculette et requis l'assistance de l'Agence flamande de la Navigation intérieure (De Vlaamse Waterweg). Et c'est ainsi qu'en guise de test, un premier bateau rempli de papier s'est amarré à Aalter le 10 décembre dernier.
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Chaque année, pas moins de 4 000 camions chargés de papier approvisionnent le grossiste Igepa, à Aalter. L'entreprise ambitionne à présent de sortir 500 poids-lourds de la route en optant pour un transport par la voie d'eau. Pourquoi venir grossir les embouteillages alors que des péniches peuvent parfaitement faire l'affaire ? Igepa a sorti sa calculette et requis l'assistance de l'Agence flamande de la Navigation intérieure (De Vlaamse Waterweg). Et c'est ainsi qu'en guise de test, un premier bateau rempli de papier s'est amarré à Aalter le 10 décembre dernier.Le distributeur Igepa entend prendre les devants sur un marché du papier en recul afin de pouvoir faire la différence demain. Actif depuis toujours dans la papeterie, il appuie ses activités sur trois solides piliers : la diversification, la digitalisation et le développement durable. Et au sein de ce dernier volet, il se penche régulièrement sur des projets porteurs d'un impact écologique et sociétal. Par exemple, 2 500 nouveaux arbres ont été récemment plantés à Aalter dans le cadre de la campagne " Paper is nature ", destinée à rappeler que le papier est un produit naturel.Igepa se fait livrer chaque année plus de 10 000 tonnes de papier par The Navigator Company, un fournisseur portugais connu pour son implication écologique. Les marchandises sont expédiées par porte-conteneurs jusqu'au port de Rotterdam, où la cargaison est déchargée sur des camions. Comme Aalter possède elle-même un quai, une autre solution a commencé à germer dans les esprits. Pourquoi ne pas ne pas rediriger le porte-conteneurs vers le port d'Anvers, et de là, transborder la marchandise sur une péniche ? Celle-ci gagnerait alors Aalter par le canal Gand-Bruges, pour décharger à quelques hectomètres à peine du site d'Igepa." Du rêve à la réalité, il y a souvent bien des obstacles pratiques à lever ", dit Dirk Salens, CEO d'Igepa. " D'où l'intérêt de s'entourer de professionnels dès le début. Non seulement pour des considérations purement fonctionnelles, mais aussi pour éviter d'exploser le budget. Si c'est pour perdre de l'argent, organiser une nouvelle supply chain n'a aucun sens. " Igepa s'est donc mis à table avec les experts en transport de De Vlaamse Waterweg, lesquels ont réalisé des calculs précis en termes de capacité de chargement et de quais disponibles. Le savoir-faire de Tieleman, le spécialiste local du levage, est également venu bien à point.Mais le plus gros défi logistique d'Igepa était peut-être ailleurs : il s'agissait en effet de remplacer un rythme de 2 camions/jour par un superchargement unique de 400 tonnes toutes les 2,5 semaines - soit l'équivalent de 25 poids lourds. La mobilisation d'un personnel supplémentaire, la mise à disposition de l'espace nécessaire dans l'entrepôt et le transbordement rapide de la péniche vers les remorques représentaient autant de points d'interrogation. Toute l'opération fut donc préparée jusque dans ses moindres détails. Il ne restait donc plus qu'à attendre le 10 décembre pour en voir le résultat concret.Quel est donc ce nouveau concept LCT (littéralement : terminal à conteneurs léger) pour le transport et le transbordement de conteneurs ? La réponse de Christine De Groef et Carl Verhamme, spécialistes du transport externe pour De Vlaamse Waterweg : " Un LCT permet de se passer d'onéreuses installations de transbordement en utilisant des grues classiques. La rupture de charge s'opère ainsi de manière 'lean' pour rester compétitive en termes de prix. Chaque mouvement en chaque lieu doit être minutieusement planifié et minuté. On peut comparer cela à un changement de pneumatiques pendant un Grand-Prix de F1. L'arrêt au stand prenait plusieurs minutes voici quelques décennies ; contre moins d'une seconde aujourd'hui. Ce qui demande perfection dans l'analyse, collaboration poussée et coordination parfaite de l'ensemble de l'opération, qui est extrêmement innovante dans sa simplicité ! "" Ce projet-pilote suscite également l'intérêt d'autres entreprises ainsi que du Voka ", explique Dirk Salens. " Il s'inscrit dans son ensemble dans la politique de De Vlaamse Waterweg visant à optimiser le mode fluvial. Des terrains industriels viennent s'ajouter sur l'autre rive du canal, où des activités liées à la voie d'eau peuvent se déployer. Cela ne se fait pas. Est-ce par manque d'infrastructure portuaire ou la sous-utilisation du quai est-elle due au manque d'intérêt des entreprises ? L'histoire de l'oeuf et de la poule donc, mais nous voulions casser cette logique. Ce que nous faisons avec les moyens à disposition. Un calcul a posteriori prenant en compte le timing, le volume d'émissions, l'efficience et les coûts de revient nous apprendra si ce mode de transport est économiquement viable. Peut-être une synergie avec d'autres parties peut-elle le rendre plus intéressant. Nous avons reçu un subside pour ce test, mais nous injectons naturellement nous-mêmes des moyens financiers dans le projet. Quoi qu'il en soit, le système doit devenir autosuffisant au fil du temps. Mais l'attentisme n'est pas dans notre nature ; nous préférons nous retrousser les manches. En prenant l'initiative en matière d'entreprenariat durable, on peut inspirer d'autres secteurs de la société et même infléchir la politique. "" Le succès de ce projet-pilote montre que de plus en plus d'entreprises croient en l'avenir du transport fluvial. Leurs dirigeants sont plus que jamais à la recherche de solutions logistiques et d'améliorations durables, et le transport par voie d'eau leur offre des possibilités ainsi que l'a illustré cette initiative. Outre un bel exercice en soutien du transport durable, ce projet est aussi le fruit d'un investissement conjoint d'Igepa et de De Vlaamse Waterweg nv, ", a déclaré ir. Chris Danckaerts, administrateur délégué de De Vlaamse Waterweg nv.La ministre flamande de la Mobilité et des Travaux publics Lydia Peeters espère elle aussi que davantage d'entreprises suivront l'exemple d'Igepa et que le changement de mentalité va s'opérer : " L'autorité flamande a investi des sommes considérables dans le développement et la qualité de nos voies navigables ces dernières années. Je lance un appel à tous les entrepreneurs pour qu'ils ne restent pas à regarder les embouteillages grossir devant leur porte et qu'ils réfléchissent sérieusement à un transfert modal vers la voie d'eau. La navigation permet un transport plus efficace et plus économique des marchandises. Et chaque chargement véhiculé par voie d'eau, c'est un camion en moins sur la route. "