Qui dit cosmétique belge pense immédiatement à Mylène. Après six années d'expérimentation avec un site Web fermé (accessible aux participantes des "home parties"), la marque est désormais aussi disponible depuis l'an dernier sur un e-shop ouvert. L'assortiment comporte aujourd'hui environ quatre cents produits répartis en deux catégories principales: Beauty et Home. L'ensemble des produits liquides et des crèmes sont fabriqués par l'usine d'Heist-Op-Den-Berg. Nous avons eu le plaisir de nous entretenir longuement avec Ann Bovy, Innovation Manager de Mylène.
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Qui dit cosmétique belge pense immédiatement à Mylène. Après six années d'expérimentation avec un site Web fermé (accessible aux participantes des "home parties"), la marque est désormais aussi disponible depuis l'an dernier sur un e-shop ouvert. L'assortiment comporte aujourd'hui environ quatre cents produits répartis en deux catégories principales: Beauty et Home. L'ensemble des produits liquides et des crèmes sont fabriqués par l'usine d'Heist-Op-Den-Berg. Nous avons eu le plaisir de nous entretenir longuement avec Ann Bovy, Innovation Manager de Mylène. Ann Bovy: "Nous considérons le produit et son emballage comme un tout. Lorsque nous sortons une nouveauté, l'équipe graphique est pilotée par la personne responsable des innovations. Le service juridique et l'équipe de communication identifient de leur côté les informations devant figurer sur l'emballage. D'un côté pour satisfaire au prescrit légal ; de l'autre pour veiller à informer correctement les utilisateurs. Une fois le concept arrêté, le service des achats se met en quête des matériaux d'emballage adéquats. Ceux-ci sont ensuite testés par notre labo sur le plan de la fonctionnalité et de la compatibilité. Toute interaction entre le produit et le contenant est en effet exclue. Nous voulons absolument éviter que la qualité du cosmétique soit affectée par l'emballage, que ce soit au niveau de l'odeur, de la couleur ou la composition. Dans ce dernier cas, il peut y avoir danger pour celui ou celle qui l'utilise. Le législateur nous impose donc de faire en sorte que la sûreté du produit soit garantie pendant toute sa durée de conservation. Le sujet étant délicat, de plus en plus de fabricants d'emballages commencent à réaliser eux-mêmes les essais de matériaux requis. Une fois tous les obstacles levés, nous entamons les tests de fabrication en usine. Le but est de voir si les nouveaux types peuvent être remplis, pliés, soudés, etc. sur les lignes existantes. Si ce n'est pas le cas, le Plant Manager réalise une analyse des coûts. Il appartiendra alors au management de rapporter ceux-ci aux bénéfices, et de trancher." "Dans la phase de développement, l'accent est mis sur les essais de conservation et de compatibilité. Nous devons garantir trente mois pour la plupart des produits. Mais nous ne pouvons bien sûr pas nous contenter de les laisser sur l'appui de fenêtre pour voir ce qui se passe pendant tout ce temps. Nous procédons donc à des tests de vieillissement accéléré. L'emballage est ainsi conservé douze semaines dans des conditions extrêmes: hautes et basses températures, lumière crue, forte hygrométrie, etc. Mylène a 55 ans d'expérience au compteur ; nous sommes donc à même de bien estimer si les matériaux et designs d'emballage envisagés risquent ou non de poser des problèmes. Les produits à base d'huile seront généralement conditionnés sous verre, car certaines huiles peuvent interagir avec les plastiques. Le flacon risque alors de se tasser sur lui-même, ce qui nuit à l'esthétique. Les bâtonnets et sprays parfumés se conservent également mieux sous verre. Tout dépend de leur teneur en alcool, dont le pouvoir solvant pourrait dissoudre certaines composantes du plastique. Si ces substances migrent vers le produit, ses spécifications peuvent changer. Lorsque le plastique reste la seule option possible, nous prévoyons une couche supplémentaire dans l'emballage pour éviter d'éventuelles interactions. Nous buttons parfois malgré tout sur des obstacles imprévus. Ainsi l'odeur d'un des éléments du packaging peut interférer avec le parfum du produit final." "L'automatisation maximale est la clé pour maintenir un prix de revient en équilibre. Cet objectif n'est hélas pas toujours compatible avec des emballages innovants et élégants. Les fioles ont ainsi tendance à basculer sur le convoyeur. Les petits tubes sont souvent difficiles à remplir. Parfois, la buse de la pompe est trop longue, ce qui complique un remplissage automatique. Les bouteilles asymétriques ou de très grands formats ne peuvent actuellement pas être étiquetées automatiquement. La manière de plier de notre cartonneuse ne convient pas pour tous les étuis. Vous l'aurez compris: une manière économique de concilier créativité et aspect pratique n'est jamais très simple à trouver. "L'offre dans les linéaires est pléthorique et les petits fabricants de cosmétiques doivent rivaliser avec les grandes marques. Pour attirer l'attention du consommateur, il faut se montrer très créatif avec les emballages. Ce combat, nous n'avions pas à le mener tant que nous vendions exclusivement par le biais des ateliers à domicile. Nos utilisatrices savaient que Mylène est synonyme de qualité. Aussi sommes-nous longtemps restés fidèles aux conditionnements d'origine. Mais lorsque nous avons fait le pas vers la vente en ligne, les choses ont changé. En outre, la société devient plus "fugace", et cela se répercute sur les emballages. Ce qui était encore en vogue voici deux ans est totalement démodé aujourd'hui. Il faut donc passer la vitesse supérieure pour arriver à suivre la tendance. Et puis, il y aussi les changements dans la législation relative aux informations devant figurer sur les étiquettes. Quelques légères adaptations suffisent la plupart du temps, mais parfois tout le packaging est à revoir. Simplement faute d'une place suffisante pour faire tenir tous les renseignements demandés. Ainsi est-il obligatoire de mentionner tous les allergènes à partir d'une certaine concentration dans un parfum. Aujourd'hui, la liste compte 26 substances, mais ce pourrait bientôt être 80." "Mylène a toujours pu compter sur un public fidèle. Mais hélas, on ne rajeunit pas. Nous devons donc en permanence attirer de nouveaux clients, et au premier chef, les jeunes d'aujourd'hui. Ce groupe-cible est toutefois en rupture totale avec les schémas commerciaux auxquels nous sommes habitués. Les jeunes achètent en ligne et ils trouvent leur inspiration dans les réseaux sociaux. En conséquence, l'apparence des emballages est de plus en plus essentielle, même plus peut-être que dans les magasins physiques. Parfois, le diable est dans les détails: ainsi, le nom de la marque ou du produit doit être clairement lisible sur les vlogs des influenceuses. Des couleurs typiques ou un look directement reconnaissable jouent également un rôle important dans ce contexte. En même temps, nous ne devons pas perdre de vue le fait qu'une bonne part de notre clientèle n'appartient pas à la génération Instagram. Les utilisateurs plus mûrs ne se séduisent pas avec des emballages flashy & trendy, mais bien avec une image de luxe. En d'autres termes, le branding par le packaging est devenu aujourd'hui un exercice de style incroyablement compliqué. L'e-commerce implique en outre aussi qu'il faille accorder de l'attention au transport et à la sécurité. Ainsi avons-nous introduit un carton plus fort pour les suremballages et les boîtes intérieures renforcées. Tous les coursiers ne traitent pas les paquets avec autant de délicatesse. Si quelque chose tourne mal à la livraison, c'est le service clientèle qui écope. Les clients sont de plus en plus enclins à donner leur avis, ce qui peut d'ailleurs déboucher sur des modifications des emballages." "Les nouveaux produits sont testés avant le lancement par un panel d'utilisateurs. Dans un premier temps, ils regardent le produit, mais ils évaluent aussi l'apparence et le confort d'utilisation de l'emballage. Difficile toutefois pour eux d'estimer comment il va résister à l'usure du temps. La pompe peut lâcher au bout de quelques mois. Ou c'est le potiquet qui ne ferme plus. Ou encore, il s'avère impossible de vider entièrement la bouteille. Nos clients sont très critiques et ils ne se privent pas de signaler ce genre de petits soucis. Ils le font même de plus en plus, mais nous prenons cela comme une évolution positive. Les utilisateurs nous renvoient en permanence notre image comme dans un miroir, ce qui nous force à réfléchir sans cesse à l'optimisation des produits et des emballages." "Nous ne pouvons pas vraiment parler d'une demande en ce sens. Mais nous observons clairement un intérêt pour tout ce qui est durable. Ainsi, nos produits 'vegan' ont le vent en poupe. Tout ce qui annonce comporter des 'ingrédients naturels' suscite aussi beaucoup d'intérêt. Vouloir promouvoir le développement durable pour des considérations purement économiques serait toutefois une erreur. Nous pensons qu'il est de notre responsabilité sociétale de réduire au maximum notre empreinte écologique. C'est pourquoi le recyclage figure en tête des priorités. À chaque nouveau lancement, nous privilégions expressément des solutions écoresponsables pour nos emballages. En même temps, nous visons à ce que d'ici 2022, l'ensemble de nos emballages en plastique intègrent une part significative de recyclat ou soient composés à 100% de monomatériaux. Nous adoptons des emballages à base de canne à sucre et nous remplaçons autant que possible les plastiques par du carton fort. C'est le cas par exemple avec les savons et les produits de maquillage. Depuis l'an dernier, nous essayons aussi au maximum d'éviter l'emballage secondaire. Les seules exceptions sont les fioles, tubes ou petits pots, qui n'offrent pas la place suffisante pour pouvoir y imprimer l'ensemble des informations légales et destinées à l'utilisateur. Et bien sûr, il y a les produits qui sont conditionnés sous verre." "Il n'y a pas de réponse définitive et unanime à la question de savoir si l'empreinte écologique des plastiques recyclés est ou plus non plus lourde que celle du verre. Le verre est plus pesant et plus volumineux à transporter. Sa refonte consomme en outre énormément d'énergie. Beaucoup de consommateurs ont peut-être tendance à associer le verre au développement durable, mais ce n'est pas toujours vrai. Mylène n'opte de ce fait pour un emballage en verre que dans les cas où le risque d'interaction est trop élevé. Et aussi pour des produits premium à l'occasion, mais alors surtout pour l'apparence. Pour les produits de douche et de bain, le verre est exclu pour des raisons de sécurité. Imaginez que la bouteille vous glisse des mains et éclate en mille morceaux!" "L'hygiène est un hot topic dans notre secteur depuis quelques années déjà, mais la tendance s'est naturellement accentuée avec le COVID-19. Le consommateur ne veut plus avoir à sortir le produit manuellement du pot. Aussi avons-nous de plus en plus de doseurs, de pompes et de spatules. Cette évolution a ceci de bien qu'elle a un effet positif sur la durée de conservation des produits, et même sur leur qualité. Un doigt mal lavé est toujours un vecteur de bactéries et de virus. Ceux-ci colonisent alors le produit et en altèrent la composition chimique, ce qui peut même provoquer à terme des réactions cutanées indésirables. Une autre tendance importante est la soif d'informations complémentaires. Le consommateur souhaite la clarté sur les ingrédients, leur origine, l'approvisionnement éthique, etc. Il est impossible de tout mentionner sur l'emballage lui-même. Nous expérimentons actuellement en faisant figurer ces infos sur le site Web. Peut-être les nouvelles technologies vont-elles apporter une solution, mais nous n'en sommes pas là. D'abord, nous voulons miser au maximum sur le développement durable et sur un renouvellement visuel qui soit attrayant pour tous les groupes d'âge."