En octobre 2021, la dernière journée de la Fespa, l'expo des spécialistes de la signalétique, avait accueilli 7 800 visiteurs. Surtout originaires du Benelux, ce qui n'avait rien d'étonnant puisque l'évènement se tenait à Amsterdam. Plus singulier en revanche fut que 54% d'entre-eux assistaient pour la première fois à une Fespa. Tout semble donc indiquer que ces nouveaux-venus cherchaient à s'orienter sur les possibilités potentielles du marché du grand format..
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En octobre 2021, la dernière journée de la Fespa, l'expo des spécialistes de la signalétique, avait accueilli 7 800 visiteurs. Surtout originaires du Benelux, ce qui n'avait rien d'étonnant puisque l'évènement se tenait à Amsterdam. Plus singulier en revanche fut que 54% d'entre-eux assistaient pour la première fois à une Fespa. Tout semble donc indiquer que ces nouveaux-venus cherchaient à s'orienter sur les possibilités potentielles du marché du grand format.. Et ces opportunités sont légion, affirment Fred Brouwer (Agfa), Roel Wijnants (Canon) et Huib Kolen (Ricoh). Qui font tous trois la même observation: les imprimeries offset investissent déjà dans le grand format. "Inversement, on voit peu de signaléticiens proposer des solutions d'impression graphique", analyse Kolen. Exception faite des pionniers et avant-gardistes, les prestataires graphiques conventionnels se montrent souvent encore réticents, dit Wijnants: "Nous devons vraiment les convaincre. L'incertitude règne ; ils n'ont pas l'habitude." Il y a naturellement des différences importantes entre l'offset et l'impression grand format, dit Brouwer: "Mais il ne faut pas directement placer la barre trop haut. Faites des choix raisonnables ; accumulez de l'expérience et de l'expertise et continuez sans cesse à élargir vos possibilités. Nous voyons aussi des entreprises ouvrir une branche séparée, parfois sur un site propre, pour d'abord reconnaître le marché." Pour Kolen, il est difficile d'expliquer, par exemple, aux marketers le pourquoi de l'existence de ces deux mondes: "Tout ce qui les intéresse, c'est que leur besoin de communication soit satisfait. Et ce de préférence auprès d'un fournisseur unique et multiservices." Il se dit dès lors convaincu que les univers du sign et du print vont converger: "Nous avons encore la Fespa pour un marché, et la Drupa pour l'autre. Mais dans la pratique, les deux sont occupés à fusionner." Comme Brouwer le fait également remarquer: "Les imprimeries voient leur marché traditionnel se réduire et leurs marges se contracter. La concurrence est forte, également à cause de l'arrivée des imprimeurs en ligne. Le passage au grand format permet d'exploiter de nouveaux volumes d'affaires, d'élargir la palette de services au client et d'étoffer les marges." Wijnants: "En se diversifiant dans le grand format, l'imprimeur qui veut avancer s'ouvre de très belles possibilités." Le marché graphique recèle un important groupe-cible pour les solutions grand format aussi bien d'Agfa que de Canon et Ricoh. Brouwer: "Tout comme Agfa, nous avons naturellement nos racines dans le monde de l'offset. Nous connaissons bien ces clients et nous pouvons les accompagner dans cette évolution en direction du grand format. Raison pour laquelle nous sommes nous-mêmes actifs à ce niveau: au début, nous voulions organiser la vente par l'intermédiaire de distributeurs, mais il est important que nous soyons aux commandes. En procédant de la sorte, nous nous sommes de plus en plus familiarisés avec le monde de la signalétique et nous nous y sommes fait un nom - notamment grâce à des entreprises réputées qui ont investi dans des machines Agfa. Tant et si bien que nous voilà autour de la table avec tous les grands acteurs, dans le monde de la signalétique également." Canon aussi peut s'appuyer sur l'expertise accumulée dans le marché graphique avec l'installation de systèmes de production numériques à toner ou jet d'encre. Idem pour Ricoh: "Les clients existants savent qu'ils peuvent se fier à notre technologie, notre développement produits et notre SAV." L'expérience de l'impression grand format dans le monde de la signalétique est également considérable: Canon est un nom connu. Et si Ricoh n'est encore que modestement active avec ses propres machines sur le marché du sign, elle fournit depuis longtemps ses têtes jet d'encre à différents fabricants d'imprimantes, dont Durst, par exemple. Wijnants: "Le plus gros obstacle n'est pas la technique. Une machine à installer, puis une ou deux journées de formation, et vogue la galère. Non, le défi est surtout ailleurs." Son explication: "Celui qui veut vendre du grand format doit être prêt à y insuffler beaucoup d'énergie. Il faut de l'initiative et de la proactivité pour arriver à faire rentrer les volumes nécessaires. Un volume qui est toutefois déjà potentiellement présent chez la plupart des acteurs ; mais convaincre les clients de recourir aux nouveaux services prend du temps. C'est un 'nouveau business' et des mesures supplémentaires doivent être prises. Celui que cette perspective ne rebute pas a certainement le marché pour lui." Dans ces "mesures supplémentaires", il y a aussi l'investissement dans des équipements et services annexes, enchaîne Brouwer: "Le piège serait d'investir dans un système d'impression grand format sans suffisamment réfléchir à la finition. Il faut y songer à temps, surtout si on a besoin d'une table de découpe ou de fraisage - ne serait-ce que du point de vue des mètres carrés et de la logistique." Kolen: "Les produits de signalétique ne se limitent bien souvent pas à la seule impression. Il y a encore la finition, le placement in situ, la pose sur véhicules. Ce qui nécessite d'authentiques spécialistes en service extérieur qui sont seuls à même de finaliser de telles commandes." Fred Brouwer évoque une autre chausse-trappe pour les nouveaux arrivés: "N'allez pas d'emblée prétendre que vous pouvez 'tout faire' - c'est courir après les problèmes." Les applications sur le marché du grand format sont très diverses et un grand nombre de variables interviennent de ce fait dans leur production: supports d'impression, encres, techniques, et par exemple aussi primaires. "Ce qui nécessite une connaissance qu'il faut acquérir. Le mieux est de d'abord tester les matériaux et de ne vendre que certaines applications, le temps d'accumuler suffisamment d'expérience. Procédez par petits pas et élargissez l'assortiment au fur et à mesure. Demandez-vous s'il est absolument indispensable de pouvoir aussi imprimer sur du verre, par exemple - ne vaut-il pas mieux laisser cette tâche à un spécialiste?" Même son de cloche du côté d'Huib Kolen: "On n'est pas obligé de tout faire soi-même. Identifiez bien le besoin auquel vous voulez répondre et faites des choix. Cela aide aussi pour sélectionner la bonne imprimante grand format et la technologie ad hoc." Les imprimeurs qui sont déjà venus jeter un oeil à la Fespa savent que le choix de machines et de technologies exposées y est énorme. En gros, on distingue deux sortes d'imprimantes grand format: à plat et à rouleau. Brouwer: "Nous voyons encore bien que des imprimeries préfèrent opter pour un système hybride, capable d'imprimer sur des supports aussi bien rigides qu'en rouleau. L'idée est de pouvoir proposer le maximum d'applications différentes." Selon les applications, le matériau nécessaire et les exigences posées, le choix du bon type d'encre constitue aussi un critère important. Le format souhaité compte aussi, comme la largeur maximale du rouleau ou l'épaisseur des panneaux. Roel Wijnants cite les imprimantes à rouleau Canon de série imageProGraf comme modèles "d'entrée de gamme", avec lesquels les imprimeries peuvent se mettre immédiatement au travail: "Nous avons récemment lancé des encres fluorescentes, qui conviennent bien pour les posters et affiches, par exemple. Et la machine peut aussi parfaitement servir dans l'atelier pour les épreuves." Canon vise surtout aussi le marché graphique avec les imprimantes à rouleau Colorado: "Celles-ci utilisent nos encres UV-gel, introduites voici environ cinq ans, qui contribuent à des cadences d'impression élevées. Les imprimeurs qui ont l'habitude des formats jusqu'à 70 x 100 cm peuvent imprimer jusqu'en 260 cm de large. De quoi leur ouvrir la porte de toutes sortes de nouvelles applications, comme des bâches, des impressions sur toile, du papier peint et des autocollants. Nous dénombrons déjà pas mal d'installations auprès d'imprimeries - singulièrement aux Pays-Bas, mais la Belgique est en bonne voie." Et Canon dispose en outre d'un troisième atout depuis peu: la série d'imprimantes à plat Arizona pour les imprimeurs qui veulent vraiment élargir leur offre. "Nous avons jusqu'ici surtout installé ces machines chez des sérigraphes. Le pas à franchir y est beaucoup moins grand et il a été fait voici une dizaine d'années déjà. Le marché de l'offset se trouve toujours dans une phase initiale, mais nous voyons l'intérêt clairement grandir là aussi." Agfa propose un vaste assortiment dans le domaine du grand format. La série Anapurna comporte aussi bien des imprimantes rouleau-rouleau, qu'à plat ou hybrides (pouvant traiter à la fois des panneaux et des supports enroulés). Lors de la Fespa 2021, à Amsterdam, personne ne pouvait louper les débuts en salon de la très imposante (3,3 mètres de large) Jeti Tauro H3300 UHS LED, surnommée "The Beast" par son constructeur. Capable d'imprimer jusqu'à 600 m2/h aussi bien sur des panneaux rigides que sur des supports en rouleau, cette "bête" peut tout faire - produits de signalétique, communications visuelles ou encore, par exemple, emballages en carton ondulé - et ce 24h/24 et 7j/7. Brouwer explique que l'assortiment grand format d'Agfa commence à partir du "segment milieu de gamme": "Nous offrons à nos clients la possibilité de faire évoluer leur capacité avec le marché. Ce qui peut se faire, par exemple, en plaçant un second système, ou simplement un système plus grand pouvant produire plus. On voit aussi que des imprimeries ayant commencé par une machine grand format hybride lui adjoignent une configuration à rouleau après un certain temps pour pouvoir travailler encore plus efficacement." Ricoh a lancé une première imprimante à rouleau en 2016: la Pro L4100, présentée sur son propre stand lors de la "Fespa Digital" d'Amsterdam. Ces machines utilisent des encres latex à résine aqueuse (AR), qui sèchent rapidement, peuvent s'imprimer sur une large gamme de matériaux et conviennent pour les applications d'intérieur et d'extérieur. Lors de la Drupa 2018, soit deux ans plus tard, Ricoh incorporait des imprimantes à plat dans son assortiment, en partenariat avec EFI, et en 2019, le fabricant montrait une imprimante à plat de conception propre à la Sign & Print Expo: la Ricoh Pro TF6250. L'imprimante à rouleau de nouvelle génération Pro L5160 était présentée au même salon. Kolen se dit satisfait des résultats obtenus depuis lors: "Avec une gamme relativement limitée, nous avons pu bien aider nos clients existants (qui avaient investi antérieurement dans nos systèmes de production graphique) à élargir leur marché en direction du grand format." Ricoh ne sera pas encore présente à la Fespa avec sa propre machine, explique Kolen: "Le salon est bien sûr intéressant pour nous aussi, mais alors, nous devons avoir une offre complète. Nous y sommes par ailleurs présents avec nos têtes d'impression, chez les différents fabricants qui utilisent notre technologie jet d'encre." Kolen confie que Ricoh entend approcher le marché de la signalétique par l'intermédiaire d'un revendeur: "Nous voulons apporter un complément significatif au portefeuille avec nos encres latex." Pratiquement toute imprimerie semble donc pouvoir trouver chaussure à son pied. Un autre point à ne pas négliger est le flux de production - un thème qui peut compter sur une attention accrue lors des Fespa. Fred Brouwer: "Avant, toute machine était commandée par son propre RIP et avait un mode de fonctionnement propre, et il était de ce fait très difficile de garder la gestion des couleurs sous contrôle. Or, et certainement dans les environnements combinant des presses et des imprimantes, on souhaiterait pouvoir compter sur un mode de pilotage uniforme. Agfa a développé pour ce faire le workflow Asanti pour systèmes grand format, ce qui rend possible leur intégration transparente dans le flux de production de l'imprimerie." Il en va de même du logiciel Onyx de Canon, explique Roel Wijnants: "Il peut opérer de manière totalement indépendante mais aussi être intégré dans des flux de production existants. On peut aller aussi loin qu'on veut, comme avec tout flux de production PDF." Ricoh aussi, avec le rachat de Colorgate en 2018, avait répondu au souhait des imprimeries de gérer tous les flux de travail à partir d'un environnement unique. Huib Kolen: "De quoi rendre parfaitement possible la convergence inéluctable de l'offset et du grand format."