"Visons l'optimum plutôt que le maximum"

Le design paraît simple, mais l'impression est trompeuse. Une boîte en carton blanc que le talent de Richard Mooij fait ressembler à une mini-piscine. On voit flotter sur l'eau, le chien, la saucisse ou la bouée gonflable contenue dans l'emballage. Cette création a valu à Richard Mooij de remporter non seulement un Platinum Penta Award, mais aussi un Gold Vertex Award et un Dutch Creativity Award. Et il figurait aussi sur la shortlist des Dutch Packaging Awards. Un beau succès que Mooij relativise. "J'ai eu une bonne année. Non pas que ce soit tellement important, mais décrocher un prix fait toujours plaisir. Je savais que mon travail était bon, alors pourquoi ne pas le montrer? Je ne me prends pas trop au sérieux, mais voir son travail reconnu est assez agréable. On en retient de nouveaux contacts et aussi de bonnes raisons de continuer. Il en ressort en fin de compte toujours quelque chose." Les jurys des différents prix ont loué la combinaison de simplicité et de subtilité du design. Mooij: "Je produis beaucoup - parfois le résultat répond aux attentes sans plus, mais parfois tout se met en place. Le design de la piscine que j'ai fait pour Hema en est un bel exemple. Ou comment obtenir un effet maximum avec un minimum de moyens. Si les gens sourient en voyant ce que je fais, je sais que je suis dans le bon. C'est aussi ce que les membres des différents jurys ont dit. Je suis très content d'avoir pu surprendre des professionnels du métier." Mooij avait déjà conçu des emballages pour Hema auparavant. Il se sent bien avec ce donneur d'ordre. "Hema a toujours été une adresse progressiste pour l'ouvrage 'à la hollandaise'. J'y ai eu mon premier boulot et donc je connais bien la boutique. Je sais comment on fait un bon emballage Hema: droit au but et le plus simple possible. Pour le retail, il faut que ça soit fait rapidement, car le marché attend. Concevoir pour les marques demande la plupart du temps une longue réflexion. Jouer au petit magasin, comme le fait Hema, participe d'une autre dynamique. Il y a quelque chose de rock & roll, ce qui donne des designs plus spontanés, plus audacieux." Des dernières tendances et évolutions dans le domaine du packaging design, Richard Mooij retient surtout l'aspect visuel. "Je ne suis pas particulièrement au fait des tendances, mais en matière d'image, on en revient à mon avis à la dimension humaine. Les années septante sont de retour. Ce qui veut dire pour moi, une approche moins 'conceptuelle'. Jusqu'il y a peu, le packaging design tournait souvent autour de la séduction et du luxe. Avec des photographies grandioses et une profusion d'images. Aujourd'hui, c'est différent. Pour le dire un peu abruptement, je pense que les designs deviennent plus simples. C'est dans l'air du temps. Une réponse à tout ce qui nous arrive et à ce à quoi nous aspirons." Hema a bâti sa notoriété à travers des designs reconnaissables et la chaîne à une préférence pour les emballages en papier et en carton. Le plastique est évité autant que possible pour des considérations environnementales. Cette approche plaît à Mooij. "Pour ce qui est des nouveaux matériaux, le défi pour les temps à venir me semble être que nous devons apporter ensemble une autre réponse. Comme disent les Anglo-Saxons: Once you know better, you have to do better. De ce point de vue, cette époque nous en apprend beaucoup sur nous en tant qu'Humanité. Je n'ai pas mon mot à dire sur le choix des matériaux chez Hema, mais la politique générale y est de rendre les emballages moins nocifs pour l'environnement. Je travaille volontiers avec des matériaux plus écoresponsables, mais je n'ai en fin de compte pas de préférence particulière. Chez les grands donneurs d'ordres, les choix de matériaux sont déjà faits quand le designer se met au travail. Je suis heureux qu'il existe des spécialistes des matériaux, sur lesquels je peux m'appuyer." Le choix du matériau a une influence sur l'image, dit-il. "Pour un emballage alimentaire, un sachet un papier a plus belle allure que du plastique. La plupart des donneurs d'ordres sont d'ailleurs de cet avis. Celui qui opte aujourd'hui pour du plastique alors qu'une alternative existe, doit s'en expliquer. Je m'attends à ce que les supermarchés aussi utilisent moins de plastique à l'avenir. À quelle échéance? Les gens commencent à s'en vouloir lorsqu'ils mettent du plastique à la poubelle. Nous devons revoir beaucoup de choses et consommer autrement. Viser l'optimum plutôt que le maximum." L'essor des boutiques en ligne influence aussi fortement les choix des marketeurs et des designers. Parfois, un emballage n'est même plus nécessaire. Mooij: "Le géant du Web Amazon pousse depuis des années à la réduction des emballages inutiles. Quand vous commandez un jouet, vous le recevez sans emballage dans une boîte d'expédition non imprimée. 'Déballer sans s'énerver', ils appellent ça. Une démarche qui s'inscrit aussi dans les évolutions actuelles. On vit une époque intéressante. Celui qui a envie d'une bière bien fraîche, la souhaite naturellement dans une vraie bouteille. Et s'il en commande douze, elles lui seront probablement livrées dans une caisse en carton." Mooij a signé la surimpression des bouteilles de bière Wispe. Un design sobre avec des lettres sans empattement et le même canevas à l'avant et au dos. Il n'y a pas d'étiquette à proprement parler ; le design est directement imprimé sur le verre. "Les bouteilles sont sérigraphiées en Belgique. La sérigraphie a directement plu au donneur d'ordre, car le procédé correspond bien aux valeurs de la marque et à la qualité de la bière. En l'occurrence, la forme découle de la fonction, pourvu que ce soit faisable techniquement. Le graphisme est des plus dépouillés - ni ombres ni étoiles ou autres fioritures." Les emballages personnalisés ou à impression variable ont toujours du succès. Mooij se dit intéressé par les possibilités, comme dans l'exemple de Coca-Cola. Voici quelques années, le limonadier avait imaginé une campagne proposant au consommateur de faire imprimer son prénom sur l'étiquette. Mooij s'attend à ce que cette tendance se poursuive. "Les nouvelles possibilités nourrissent l'inspiration. Coca-Cola s'y est vraiment bien pris. La campagne était totalement dans l'esprit de la marque. Je préfère les designs en rapport avec la nourriture, qu'il s'agisse d'un sachet de chips ou d'une brique de lait. Quand je parcours les allées d'un supermarché, je trouve toujours chouette de voir des choses qu'on pourrait améliorer." 2021 s'annonce chargée de beaux défis pour Magnet Design Firm. Malgré toutes les incertitudes autour de la crise du coronavirus, Mooij envisage l'année en confiance. "Certaines commandes disparaissent et d'autres prennent le relais. Je viens de mettre la dernière main à un gros projet pour la chaîne de restauration La Place. Elle a relooké sa formule, et j'ai pris le packaging à mon compte. Cela concerne tout ce qui est à usage unique, des plateaux et tasses à café en passant par les emballages alimentaires et les bouteilles de jus. Pour l'instant, j'ai beaucoup à faire, et 2021 me fait envie. J'espère naturellement décrocher un nouveau prix avec l'un de mes designs. L'intention est toujours de faire quelque chose de réussi et qui se remarque. Mais si je ne suis pas récompensé, ça me va aussi. Ce sera peut-être pour l'année prochaine."